Lever le Niveau de Service dans nos Hôtels : Le Cas des Sandales Dépareillées

Je ne sais pas si tu as déjà séjourné dans certains hôtels au Cameroun, surtout ceux en zone rurale. Je viens de faire le check-in dans mon deuxième hôtel cette semaine, à Bafoussam, après avoir séjourné dans un autre à Bafang il y a deux jours. Depuis le début de l'année, j'ai séjourné dans plusieurs hôtels, que ce soit au Cameroun (Bafoussam, Douala), en Côte d’Ivoire, au Congo, en Allemagne ou encore en Italie. Donc je peux te dire deux ou trois choses sur le sujet.

Mais aujourd'hui, je ne vais pas te parler des différences entre ces hôtels ou de la qualité de service. On va laisser ce sujet pour un autre jour. Peut-être qu'on en parlera juste un peu avant d'annoncer le lancement de notre chaîne hôtelière locale. Comme apparemment, on doit tout refaire dans ce pays.

Aujourd'hui, je vais te parler d'un petit truc que j'ai constaté dans les hôtels du Cameroun il y a quelques années déjà. Une pratique dont je pensais tout le monde au courant de l'origine, jusqu'à ce que Flavien me dise il y a deux jours qu'il n'en avait aucune idée. Et sur les sujets des séjours en hôtels, il en sait un PAQUET!

Il s'agit de cette fâcheuse habitude que nous avons dans nos hôtels de mettre des sandales dépareillées. La raison serait que les clients les emporteraient. Du coup, pour limiter le vol, nous avons fait ce que nous savons faire de mieux : la course vers le bas. Dégrader le service pour tout le monde à cause d'une poignée de mauvaises personnes.

Le problème, c'est que ces sandales en gros ne coûtent même pas 500 FCFA. Vous louez des chambres à partir de 15 000 FCFA la nuit et vous n'avez tellement pas confiance aux clients que vous leur mettez des sandales dépareillées. Les gens vous font confiance avec leurs vies en dormant sous vos toits, ils vous font confiance quant au fait que vous nettoyez régulièrement vos chambres et la literie, mais vous n'êtes pas capables de leur faire confiance avec des sandales de 500 FCFA.

Je ne suis pas “encore” dans le business de l'hôtellerie et je n'aimerais pas me poser en donneur de leçons. J'imagine que ces 500 FCFA représentent un manque à gagner pour les hôteliers. Mais la solution trouvée, selon moi, est très mauvaise. Nous ne pouvons pas être dans le business de l’hospitalité et envoyer comme premier message au client qui entre dans sa chambre : “Je me méfie de toi.” Il y a tellement de façons de régler ce problème.

On peut, par exemple, ne pas mettre de sandales du tout dans les chambres et laisser un mot pour que chaque client en fasse la demande à la réception s'il en a besoin. La plupart des clients ne les utilisent d’ailleurs pas. Pourquoi risquer de leur manquer de respect pour un produit qu'ils n'utiliseront pas? Et pour les rares comme moi qui les utilisent, le fait de devoir les demander à la réception réduit drastiquement la probabilité qu'ils les emportent. C’est de la psychologie.

Et au pire, si quelques clients les emportent, ce n’est pas grave. On peut répercuter les coûts sur les chambres à l'année, et je parie que cela ne reviendrait même pas à une perte de 25 FCFA par nuitée. Pourquoi se faire autant de mal?

Bref, c’était mon petit coup de gueule sur le sujet. Nous avons un pays à construire et se plaindre ou fuir ne le fera pas avancer. Je n’ai donné ici qu’un début de solution à ce type de problème. Et j'espère que tu as compris qu'il ne s'agit pas seulement d'hôtels, mais surtout de service client. Si toi aussi, dans ton business, tu recours à des solutions aussi faciles et réductrices, je t’invite à pousser la réflexion un peu plus. Si tu as un business au Cameroun, tu fais partie des ambassadeurs du pays. Et ta mission est de faire rêver tous tes clients, car c’est exactement le rêve qu’on vend à la diaspora qui les retient prisonniers là-bas.

Quand je suis rentré dans l'hôtel tout à l’heure, la première chose que je me suis dite était : “Mince, comment je peux convaincre mes enfants que leur place est ici si nous séjournons dans cet hôtel après avoir séjourné dans ceux d’Europe, comme nous le faisons souvent?” Il faut vraiment qu’on élève le niveau. Chacun dans son domaine.


Bafoussam 🇨🇲