Aujourd’hui, j’étais à Bonamoussadi, au carrefour de la mairie. Je voulais faire des photocopies. Et je suis allé dans une des librairies-papeteries qui jonchent la route en allant vers fin goudron. Si tu connais l’endroit, tu sais qu’on est à une des entrées de Denver, l'un des quartiers avec les plus hauts revenus de la ville.
Pendant que j’attendais ma photocopie, dans cette librairie qui est l’équivalent de 2 containers de 20 pieds mis ensemble, en tapant mes commentaires avec Flavien, je constate une chose. Comme le demande la loi, la fiche de paiement des impôts est affichée à l’entrée. Et tu me connais, je suis très curieux.
Je me mets donc à lire cette fiche et je me rends compte que ce commerce paie un impôt annuel de 176.000 FCFA. Je connais très bien ce montant. C’est le montant que moi-même je paie avec un de mes établissements, c’est un impôt libératoire. Tu vas te dire, rien de plus normal, un citoyen honnête. Sauf que, j’ai travaillé 3 ans dans le secteur de la librairie-papeterie et je sais un peu ce que c’est comme business.
Une librairie comme celle-là, en plein Bonamoussadi, juste en face de Denver, est capable de générer un chiffre d’affaires annuel compris entre 80 et 100 millions. Mais les gars sont tranquillement enregistrés sous le régime d’établissement et paient un impôt de 176.000 FCFA. Je te laisse faire le calcul de ce que ça représente sur le chiffre d’affaires.
Des business comme ça au Cameroun, il y en a des milliers. Ils sont nombreux au marché Mboppi à faire des chiffres d’affaires de 500 millions par an sous le régime de l’établissement. D’ailleurs, dernièrement, quand je traversais La Douche à Akwa, le nouveau China Town de la ville, je voyais tous ces magasins chinois fièrement arborer leurs noms, Ets Lee, Ets Xinji et j’en passe. Je pense n’avoir vu qu’un seul qui était constitué en SARL.
Peut-être pour toi, tout ça c’est du charabia. Mais c’est très important pour moi. Nous nous plaignons tous les jours que les choses vont mal. Mais ce sont encore nous qui conseillons les étrangers de venir ouvrir des commerces qui font le milliard de chiffre d’affaires sous le régime d’établissement pour ne payer que l’impôt libératoire. Parce que ces boutiques chinoises, oui, sont capables de faire le milliard de chiffre d’affaires annuel.
Mais bon, laissons même les Chinois tranquilles. Ils jouent juste notre jeu. Ce qui me choque le plus, c’est que le propriétaire de cette librairie est certainement une personne très riche qui a envoyé tous ses enfants étudier à l’étranger. Et ce sont ces mêmes connards qui nous chantaient dans les oreilles tous les jours que les impôts peuvent tuer quelqu’un au Cameroun. C’est avec une partie de l’argent des impôts détournés que leurs parents ont pu payer leurs écoles en Occident et aujourd’hui ils osent nous dire que le pays tue les jeunes et n’offre pas d’opportunités.
Toi qui souris, ne te sentant pas concerné parce que tes parents n’étaient pas commerçants mais fonctionnaires. N’oublie pas que nous savons tous quels sont les salaires officiels des fonctionnaires au Cameroun. Et que la plupart de ces salaires ne peuvent pas payer des études à l’étranger. Ne te réjouis pas trop, on ne t’a pas oublié.
Douala 🇨🇲