Pourquoi l'Afrique a besoin de vrais bâtisseurs, pas de consommateurs

Je pense qu’ouvrir ce débat sur l’immigration et la diaspora africaine (la camerounaise, en particulier) était une très bonne idée. Certains membres de cette diaspora, en voulant se défendre, prouvent mon point tous les jours : mon argument selon lequel cette diaspora est loin d’être aussi brillante qu’elle le laisse entendre. Elle a de gros diplômes, elle sait être un bon automate, ça c’est sûr. Mais quand il s’agit de réfléchir, de faire preuve de réflexion critique, elle est aussi nulle qu’un robot qui essaie de danser le mbolé.

Je pourrais te faire un morceau choisi de raisonnements absurdes que j’ai déjà entendus venant de cette diaspora. Peut-être que je le ferai plus tard d’ailleurs. Note to myself. Aujourd’hui, je vais juste te raconter la dernière des histoires que j’ai reçues. Ce n’est pas la première fois que je reçois une version ou une autre de cette histoire. Mais je me suis dit qu’il était temps que je la partage avec toi.

Un diaspoRIEN qui explique comment son pote, qui est un génie des télécoms, après avoir passé son diplôme d’ingénieur au Cameroun, ne trouvait pas de travail. Faute d’avoir envoyé des centaines de CV. Ce dernier a finalement immigré en France où il a trouvé un salaire et maintenant il peut manger à sa faim et payer la scolarité de ses frères et sœurs.

Oui, c’est une histoire que toi aussi tu as déjà entendue certainement des dizaines de fois. Peut-être que toi-même tu l'as déjà racontée plusieurs fois. Mais avant de te demander pourquoi je la trouve absurde, je te demande de prendre quelques secondes et d’essayer de réfléchir. De te poser les bonnes questions. De faire un essai de réflexion critique. Je t’attends…

Ça y est ? Ok, allons-y !

Déjà, si tu es un génie tout court, pourquoi étudier les télécoms si tu sais qu’il n’y a pas de débouchés dans ton pays ? Et si tu es un vrai génie, même s’il n’y avait qu'une place dans le milieu des télécoms, elle te serait réservée. À moins que tu ne nous sortes une autre version d’histoire selon laquelle, pour être recruté, il faut se compromettre. Et si c'est le cas, tu es en train de dire que tous ceux qui travaillent dans ce domaine se sont compromis. Un peu facile, tu ne trouves pas ?

Un génie, c’est quelqu’un qui met son intelligence au service des autres. Un automate, c’est quelqu’un qui met la compétence qu'on lui a apprise au service de son maître. Le génie saura lire son environnement et savoir quoi faire. L'automate ne saura rien faire d'autre si personne n’a besoin de la compétence pour laquelle il a été formé.

Un génie trouvera un moyen de tirer son épingle du jeu, quel que soit le terrain de jeu. Il n’a pas besoin de circonstances particulières pour briller. Que ce soit sur terre battue ou sur gazon, il reste un génie. Certes, il sera plus confortable sur certains terrains que d’autres, mais quel que soit le terrain, il fera toujours partie du top.

Le génie des télécoms, c’est celui qui, en France, a réussi à vulgariser les télécoms au point où ils soient obligés de chercher la main-d’œuvre hors de leurs frontières. Ce n'est en aucun cas celui qui, dans son pays, n'a même pas pu trouver une place sur le petit marché local et qui a dû aller être un automate ailleurs.

Je suis fatigué d’entendre parler des génies quand il s’agit de la diaspora africaine. Combien d’entre eux, en Occident, ont créé des entreprises qui font des centaines de millions de dollars de chiffre d’affaires ? Combien d’entre eux sont les fondateurs de licornes (Startups valorisées à plus d’un milliard de dollars) ? Combien d'entre eux sont des leaders incontestés dans leurs nouvelles communautés ? N’hésite pas à m’envoyer les noms. Tout ce qu’ils savent faire c’est de venir construire des meublés en Afrique.

Les Tidjane Thiam et consorts ne sont que des bons automates. Non seulement ils n’ont pas ce qu’il faut pour créer des boîtes à la taille de Crédit Suisse, mais en plus ils n'ont même pas ce qu’il faut pour être les vrais actionnaires de ces entreprises.

Elon Musk est un génie. Parti de l’Afrique du Sud, il a su s’asseoir sur le toit du monde en devenant l’homme le plus riche que la Terre n’ait jamais connu, grâce à ses entreprises tout aussi innovantes les unes que les autres. Aller aux États-Unis l’a certainement aidé à atteindre ce statut. Mais même s’il était resté en Afrique du Sud, on aurait entendu parler de lui. Il n’y a qu’à voir ce qu’il a réussi à y faire étant gamin.

Toi, tu es là, dans un pays comme le Cameroun où des personnes qui ne sont pas allées à l’école deviennent milliardaires, tu n’arrives pas à tirer ton épingle du jeu avec un diplôme d'ingénieur en télécoms. Et tes amis t’appellent génie, tu laisses. Je sens qu’on va commencer à taper vos bouches ici dehors.

L’Afrique, le Cameroun, est là où la plupart des pays développés étaient il y a quelques dizaines d’années. Nous avons besoin de travailleurs, de personnes intelligentes, de producteurs, de vrais génies, exactement comme ceux qui ont construit ces pays pour lesquels les membres de la diaspora se sont transformés en mendiants de passeport. Nous n’avons nullement besoin de consommateurs, pleurnichards et automates qui se prennent pour ce qu’ils ne sont pas.

Donc de grâce, laissez-nous en paix ! Ici, on travaille.


Douala 🇨🇲