Racines et loterie : le miroir de l'histoire à travers la mort de John Amos

Hier, le 1er octobre 2024, la mort de John Amos a été annoncée publiquement. Il serait en réalité décédé depuis le 21 août, de cause naturelle. Il fait partie des milliers de personnes, célèbres ou non, qui meurent chaque jour. Pourquoi en faire un article aujourd’hui ?

John Amos était un célèbre acteur américain que j’ai découvert pour la première fois dans son rôle de Kunta Kinté dans la série Racines. Si tu es africain comme moi, tu associes probablement son visage à celui de Kunta Kinté.

Dans cette série, adaptée du livre éponyme d'Alex Haley que je te recommande vivement de lire, Kunta Kinté est incarné par deux acteurs : John Amos, pour le Kunta Kinté adulte, et LeVar Burton, pour le Kunta Kinté jeune. Bien que l’image de Kunta Kinté que nous retenons le plus soit celle de John Amos, la scène la plus marquante de la série pour moi a été jouée par LeVar Burton. Il s’agit de la fameuse scène du nom, dans laquelle Kunta Kinté refuse d’accepter le nom d’esclave, "Toby", qui lui a été imposé. Malgré les punitions sévères, il persiste à affirmer son véritable nom, Kunta Kinté, comme un acte de résistance et de préservation de son identité et de son héritage culturel.

Cette scène est devenue l’une des plus mémorables de la série, symbolisant la lutte pour l’identité et la dignité face à l’oppression de l’esclavage. Elle illustre la force de caractère du personnage et son refus d’abandonner ses racines, malgré les terribles circonstances auxquelles il est confronté.  

Aujourd’hui, l’esclavage physique a été aboli. Cependant, nous restons prisonniers d’une sorte d’esclavage mental dans lequel nous nous complaisons volontiers. Nous n’avons plus besoin de fouets pour appeler nos enfants Toby, Paul ou Ronel. Nous n’avons plus besoin d’être transportés de force à l’autre bout du monde pour renier notre héritage culturel. Non, nous nous considérons fièrement comme des Bretons, des Savoyards, ou des Canadiens de souche. La lutte pour l’identité et la dignité n’est plus qu’un lointain mirage. Pour une poignée de dollars, nous sommes prêts à nous déguiser en bouffons et à renier tous nos ancêtres.

Peut-être que ce n’est qu’un hasard, et si c’est le cas, le hasard sait si bien faire les choses. Car bien qu’étant décédé il y a plus d’un mois, ce n’est que le 1er octobre que sa mort a été annoncée publiquement. La veille du début officiel de la loterie américaine. Cet événement où les descendants des anciens vendeurs d’esclaves, aujourd’hui, vendent le rêve aux descendants de ceux qui n’ont pas pu être capturés il y a 400 ans. Comme quoi, peut-être que les anciens esclavagistes auraient dû faire un peu de “Behavioral Economics”. Ils n’auraient pas laissé une si mauvaise presse dans l’histoire.


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