“Je cultive peu d'aliments que je mange, et pour le peu que je cultive, je n'ai pas sélectionné ou perfectionné les semences.
Je ne fabrique aucun de mes vêtements.
Je parle une langue que je n'ai ni inventée ni perfectionnée. Je n'ai pas découvert les mathématiques que j'utilise.
Je suis protégé par des libertés et des lois que je n'ai pas conçues ni légiférées, et que je n'applique ni ne juge.
Je suis ému par une musique que je n'ai pas créée moi-même.
Lorsque j'ai eu besoin de soins médicaux, je n'ai pas pu m'aider à survivre.
Je n'ai pas inventé le transistor, le microprocesseur, la programmation orientée objet, ni la plupart des technologies avec lesquelles je travaille.
J'aime et j'admire mon espèce, vivante ou morte, et je suis totalement dépendant d'elle pour ma vie et mon bien-être.”
Ceci est un mail que Steve Jobs s’est envoyé à lui-même 11 mois avant sa mort. “Je suis totalement dépendant de mon espèce pour ma vie et mon bien-être.” C’est avec cette phrase qu'il a conclu ce texte, qui était certainement pour lui une réflexion sur la beauté du système que les hommes ont construit sur Terre et à quel point nous sommes tous petits face à ce système.
Tu te demandes peut-être pourquoi je te parle de ça aujourd’hui. C’est pour te rappeler tout ce que tu dois à l’espèce humaine, tout ce que tu dois à ton pays, tout ce que tu dois à ta tribu, tout ce que tu dois à ta famille.
De temps en temps, j’entends des idiots dans la diaspora dire que le Cameroun ne leur a jamais rien donné. Certains vont jusqu’à dire que le Cameroun n’est pas prêt à les accueillir. Si tu n’as pas été dévoré par un lion dès ta naissance, c’est grâce au système de communauté que le Cameroun a mis en place. Si tes parents ont pu s’occuper de toi dans ta jeunesse, c’est parce qu’ils n’étaient pas plus occupés à leur propre survie. Le Cameroun n’a peut-être pas encore mis en place un système aussi efficace que d’autres pays, mais c’est grâce au peu que nous avons pu faire que tu es devenu qui tu es. Tu ne l’es peut-être plus aujourd’hui, mais pendant de longues années, tu as été totalement dépendant du Cameroun pour ta vie et ton bien-être. Et personne ne te respectera jamais dans le monde, quel que soit ton passeport, parce que tu es un ingrat. Un idiot qui ne cesse de cracher dans la première main qui l’a nourri.
Il y a quelques jours, je discutais avec un ami sur le problème de l’immigration. Du fait que toutes les ressources humaines, une fois arrivées à un âge où elles sont censées contribuer à améliorer le système, décident de partir. De partir afin de profiter d’autres systèmes. Je lui disais que ce n’était pas normal et qu’il fallait qu’on fasse quelque chose pour stopper ça. Et lui de me dire que ça ne le dérangeait pas plus que ça. Qu’il y aurait toujours des Camerounais sur place et que personne n’était indispensable.
Autant je suis d’accord que personne n’est indispensable, autant je pense qu’on ne peut pas faire comme si de rien n’était devant un phénomène pareil. Nous sommes bien contents d’envoyer nos enfants à l’école et qu’il y ait des personnes pour les enseigner. Au rythme où les enseignants vont au Canada, qui sera encore là pour enseigner nos enfants ? Nous sommes bien contents d’aller au marché et d’acheter des aliments que nous n’avons pas cultivés. Nous sommes bien contents de pouvoir donner nos habits à coudre chez notre tailleur préféré. Nous sommes bien contents de savoir qu’il y a une police qui veille et qui limite les crimes. Nous sommes contents de savoir que nous pouvons emmener nos différends au tribunal afin qu’un juge tranche dans une affaire qui nous lie à notre voisin ou notre ex-mari.
Toutes ces petites choses que nous prenons pour acquises disparaîtront si tout le monde s’en va. Si personne ne veut plus rester et entretenir le système mis en place par nos parents.
Ce système n’est pas optimal, je te l’accorde. Mais si nous ne l’améliorons pas, qui le fera à notre place ? Il est facile de se plaindre de ce qui ne marche pas. Mais qu’avons-nous mis sur pied ? Aussi défaillant qu’il puisse être, le système en place est meilleur que pas de système. Au lieu de cracher dessus et de fuir comme des lâches, nous devrions nous retrousser les manches et nous mettre au travail. Avec toute la technologie et l’accès à la connaissance disponibles de nos jours, ça ne devrait pas être si difficile. Non?
Bafoussam 🇨🇲