Il y a quelques jours, j’avais une conversation avec Madelle. Nous parlions des proportions. Nous avons tendance à penser que pour obtenir une certaine quantité de résultats, nous avons forcément besoin de la même quantité d’efforts. Certainement un biais hérité de la loi de Lavoisier qui stipule que “rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme”.
C’est sans compter sur l’effet de levier. Comme disait Archimède il y a déjà plus de 2000 ans : “Donnez-moi un point d’appui et un levier, et je soulèverai le monde.”
Nous n’avons pas besoin, pour changer les choses ou faire évoluer un système, d’un nombre impressionnant de personnes. Nous avons juste besoin d’utiliser intelligemment la puissance de l’effet de levier. Un peu comme le fait justement Madelle avec ses clients qui veulent devenir propriétaires en Allemagne : des clients qui utilisent la puissance de leur salaire pour obtenir un crédit immobilier sur un appartement... dont le locataire paiera les traites.
Cet effet de levier, on peut aussi l’observer dans la loi de Pareto, où 80 % des résultats proviennent de 20 % des efforts.
La science est universelle. Tout comme la nature humaine. Un peuple n’est pas fondamentalement plus stupide qu’un autre. Il n’abrite pas plus d’insensés qu’un autre. Nous avons à peu près tous les mêmes proportions.
Alors pourquoi l’Afrique semble-t-elle faire du surplace quand d’autres peuples réalisent des merveilles chaque jour ? Je pense que cela vient d’une mauvaise connaissance des principes. Nous avons en Afrique le nombre de personnes nécessaires pour nous faire décoller. Mais ces personnes ne sont pas forcément au même endroit. Et beaucoup désertent leur mission, convaincues qu’elles sont seules. Qu’elles ne peuvent pas faire grand-chose toutes seules. Cependant l’effet de levier est assez particulier. Avec le bon point d’appui et un bâton de deux mètres, tu peux soulever un tracteur. Mais si ce bâton est raccourci de seulement 10 cm, tu ne pourras peut-être même plus soulever une moto.
Pour nous sortir de la misère, nous devons atteindre ce nombre critique de personnes travaillant sérieusement sur le problème. Nous n’avons pas besoin de tout le monde. Mais sans ce minimum vital, nous n’y arriverons pas. Et l’une des missions que je me suis données, c’est de rassembler ce nombre critique.
Tu fais certainement partie de ces personnes, si tu as un certain niveau d’éducation et d’ouverture d’esprit. Tu te dis peut-être que ta contribution ne changerait rien à notre sort. Mais je peux t’assurer que le fait de ne pas t’engager nous fait plus de mal qu’autre chose.
Si l’Afrique en est là aujourd’hui, c’est en grande partie parce que les personnes comme toi — les personnes éduquées, qui pourraient l’aider à se relever — ont abandonné leur poste.
Nous avons beaucoup de problèmes, beaucoup d’obstacles qui rendent la tâche un peu plus difficile, certes. Mais ces obstacles, tous les autres peuples les ont connus, d’une manière ou d’une autre. Ça fait partie du deal.
Si nous en sommes là, ce n’est pas la faute des autres (suis mon regard), ce n’est pas la faute du gouvernement, du président ou du système. C’est de notre faute à toi et moi, qui sommes le levier de notre continent, mais avons préféré fuir nos responsabilités.
Njombé 🇨🇲