Les Mariages au Cameroun : Fêtes Importées pour Économies Étrangères

Hier soir, j’étais à une soirée de mariage. Comme je ne connais pas rester tranquille, ma tête a commencé à tourner. À un moment, je me suis demandé quel était le pourcentage de choses importées pour cette cérémonie. On avoisinait les 90%.

La salle était plutôt pas mal, avec une architecture occidentale et des piliers romains, presque toute la décoration venant de Chine. Des lustres aux chaises, en passant par les jeux de lumières, les assiettes et couverts dans lesquels nous avons mangé. Tout venait de Chine. J’ai même dû retirer quelques dernières étiquettes en chinois sur mon verre.

Les robes de la mariée ainsi que les costumes de son mari étaient aussi importés. Du tissu à la couture. Il en était de même pour la plupart des invités, dont la quasi-totalité des tenues venaient de l’étranger. Y compris moi!

Le pire, c’était que même jusqu’aux cheveux des femmes, tout était importé. Comme il est désormais de coutume dans ce genre d’événements, presque toutes les femmes arboraient une perruque. Certaines étaient même carrément blondes.

Heureusement, de temps en temps, à travers la sono importée, on pouvait écouter de la musique locale entre deux sons tout aussi importés. Je me demande quel est le pourcentage de musique africaine qu’on met dans les mariages non africains. Parce que chez nous, le ratio n’est pas bon du tout.

Tout était importé, jusqu’à la voix de l’imprésario, qui, comme ses collègues du milieu, est persuadé qu’il faut imiter un accent français, "whitiser" comme on dit chez nous, pour faire du bon boulot.

Qu’est-ce qui n’était pas importé? Pas grand-chose, en fait. Même si le poulet a été élevé localement, les poussins, eux, sont importés. Et une bonne partie de la nourriture, bien que cultivée localement, provient de semences modifiées ailleurs.

Juste au moment où je commençais à perdre espoir, une surprise a été réservée aux mariés par leurs parents. La légende camerounaise de la musique, Talla André Marie, est venue nous faire un show de plus d’une quinzaine de minutes. Il a réussi, pendant un court moment, à me faire oublier le sort triste qui est le nôtre avec sa sublime voix et son immense talent, qui eux sont bel et bien camerounais. Mais il a fallu qu’une des cordes de sa guitare importée lâche aussi pour nous rappeler à quel point nous étions dépendants des autres.

J’en parlais avec Flavien, et je lui demandais si on se marierait même encore dans ce pays si nous étions sous embargo. Lui de me rappeler que les fêtes ont été popularisées dans le monde pour booster l’économie. Que ce soit les mariages, la Saint-Valentin, Noël ou tout autre type de fête, ce sont d’abord des prétextes pour pousser à la consommation et faire vibrer l’économie d’un pays ou d’une région. Sauf que chez nous, chaque fête est un boost pour les économies de tout le monde sauf la nôtre. Chaque mariage chez nous est une fête pour les Chinois, les Français, les Italiens, les Américains. Tout le monde sauf les Camerounais.

Et si tu me dis : "Mais ce sont des Camerounais qui importent ces produits et qu’ils se font quand même du bénéfice", je te dirais oui. Mais ce bénéfice est rapidement dépensé ailleurs, dans l’achat de gros cylindrés à l’étranger ou dans l’entretien du rythme de vie de leurs enfants de la diaspora, qui ne nous serviront jamais à rien ici. Et là, je sais que tu sais de quoi je parle.


Bafoussam 🇨🇲