Droit et justice : ne confondons pas tout !

Hier dans l'avion, j'ai dû changer de place, aller tout au fond pour écrire mon texte. La raison : le passager assis devant moi avait totalement rabaissé son siège. Au point où je ne pouvais tout simplement plus ouvrir mon ordinateur en le posant sur la tablette devant moi. En demandant au personnel de bord une place où je pourrais faire mon texte tranquillement, ils m'ont rappelé que ce passager avait le droit de rabaisser son siège comme il l'avait fait.

Il y a quelques mois, je discutais avec mon cousin dont la sœur était en procédure de divorce. Cette dernière se battait au tribunal pour avoir la garde totale des enfants afin que leur père ne puisse les voir que quand elle le déciderait. Et je rappelais à ce cousin qu'il ne faut pas confondre le droit et la justice.

Je n'ai cessé de rappeler à qui veut l'entendre, et surtout aux femmes, qu'il fallait faire très attention dans la vie. Car ce n'est pas parce qu'une loi existe qu'elle est juste. Qu'en toute chose, il était important de se mettre du côté de la justice et pas forcément du côté de la loi si celle-ci était clairement injuste. Ceux qui font les lois n'ont pas souvent les mêmes intérêts et le même agenda que nous. Et suivre ces lois bêtement quand nous avons la possibilité de faire autrement serait nous exposer à des injustices plus grandes.

Pour illustrer mon propos, je prenais souvent l'exemple du divorce. Quand un couple est marié, ils sont souvent d'avis tous les deux que les enfants ont besoin de leurs présences à tous les deux pour bien se développer. Mais dès qu'ils se séparent, c'est chacun qui veut la plus grosse part du gâteau en termes de présence. Et la plupart du temps en Occident, c'est la mère qui obtient la garde et le père un droit de visite un week-end sur deux. La femme qui était d'avis il y a quelques années que ses enfants auraient besoin de leur père au moins 50% du temps, se retrouve toute contente que ce dernier ne puisse les voir que moins de 25% du temps.

J'avais l'habitude de dire aux femmes par exemple que ce n'est pas parce que le tribunal te donne droit à 50% de la fortune de ton mari que tu devrais réclamer ces 50%. Surtout quand tu sais que tu n'y as été pour rien ou presque dans la construction de cette fortune. Il serait plus sage de demander un montant raisonnable et de continuer ton bout de chemin ailleurs. Il n'y a aucune justice dans le fait qu'une personne perde des centaines de millions de dollars dans un divorce parce qu'il aurait trompé sa femme. Aucune !

Toutes les lois ne sont pas justes. Et aucune loi ne devrait se mettre entre toi et ton bon sens. Sinon tu deviens juste la marionnette de ceux qui font les lois. Et je crois que c'est quelque chose que MacKenzie Scott, l'ex-femme de Jeff Bezos, avait aussi compris. Elle aurait pu avoir droit à la moitié de la fortune de l'homme le plus riche du monde après leur divorce. Mais ça n'aurait fait que fragiliser sa position, celle du père de ses enfants. Et surtout, fait d'elle une femme aux longs yeux. Elle a certes été auprès de lui pendant qu'il bâtissait l'empire Amazon. S'occupant des enfants et tenant le foyer. Mais ce n'est certainement pas avec ses talents d'auteur qu'elle aurait pu amasser une fortune de 38 milliards de dollars. Somme qu'elle a accepté de prendre après son divorce de Jeff qui pesait plus de 135 milliards à l’époque.

Mais bon, peut-être que je devrais juste arrêter de voyager en éco pour ne plus avoir des personnes qui m'empêcheraient d'écrire mes textes, juste parce qu'elles en ont le droit.


Douala 🇨🇲 

Les paradoxes de la foi : Quand les Africains deviennent les gardiens de la religion des autres

Il y a quelques jours, j'ai pris une photo à l'école de mon fils. Une photo qui m'a fait sourire. Laisse-moi te la partager. 

Peut-être que toi aussi, tu n'y vois rien d'anormal. Comme les premières personnes à qui je l'ai fait voir. Mais je t'invite à la regarder de plus près.

Nous sommes en Savoie, en France et sur un magazine qui parle d'église catholique en Savoie, nous avons en couverture 4 personnes. 3 Noirs et un Blanc. Je ne sais pas pour toi, mais le malaise était quand même profond quand j'ai vu ça. C'est-à-dire que nous avons tellement adopté la religion des autres que nous sommes prêts à jouer les sapeurs-pompiers pour la maintenir en vie. Mais bon, faut pas déconner, c'est quand même le Blanc qui est devant et qui commande.

Je sais que quand on commence à parler de religion, beaucoup de cerveaux s'éteignent. Beaucoup de personnes préfèrent ne pas réfléchir parce que ne sachant pas quoi faire si leur réflexion les met face à leurs incohérences. Mais bon, tu me connais, je dis ce que je pense, que ça plaise ou pas.

Quand on observe un peu le monde, on se rend compte que les gens gardent tout ce qui est bon pour eux en général et quand ils décident de partager, c'est la plupart du temps pour profiter des autres. Nous vivons dans un monde où certains pays jettent plus de nourriture que d'autres n'en produisent. Dans un monde où tout le monde dit aimer l'Afrique mais personne n'est prêt à lui faire un transfert de technologie, au contraire, on se contente de continuer à l'exploiter et à faire de ses enfants des esclaves modernes. Et moi, je me demande pourquoi ils sont aussi enthousiastes de partager la soi-disant bonne nouvelle avec nous. Au point où ce sont encore nous, les Noirs, qui devons être les prêtres chez eux.

Bref, les voies du Seigneur sont impénétrables, il paraît. Mieux vaut que je continue à tirer sur la diaspora et je reste tranquille.


✈️ En vol entre Paris et Douala 🇫🇷-🇨🇲 

Il n’y a pas de repas gratuit : la leçon oubliée des Noirs

Dans une de ses lettres à son fils, John D. Rockefeller raconte l’histoire d’un roi qui rassembla tous les sages de son royaume pour leur demander une mission : écrire un livre qui condenserait toute la sagesse humaine depuis la nuit des temps. Les sages se mirent au travail et, après plusieurs mois, ils revinrent avec un livre épais, qui selon eux, contenait toute la sagesse du monde. Le roi parcourut le livre et déclara qu’il était trop long. Il demanda aux sages de le raccourcir, car un ouvrage aussi volumineux ne pourrait être lu par son peuple. Les sages retravaillèrent donc leur livre. Ils revinrent avec une version plus courte. Mais le roi leur demanda de le condenser encore davantage. Ils répétèrent l’exercice jusqu’à réduire le livre à une seule feuille. Puis, de la feuille, ils passèrent à un simple paragraphe. Et enfin, à une seule phrase : "Il n’y a pas de repas gratuit.” Le roi fut satisfait. Il déclara alors que toute la sagesse du monde tenait désormais en cette seule phrase.

Les Noirs n’ont toujours pas compris cette leçon

J’ai beaucoup souri en entendant cette histoire. Pourquoi ? Parce qu’elle résonne exactement avec ce que je dis chaque jour. Je suis convaincu que nous, les Noirs, sommes les seuls à ne pas avoir encore appris cette leçon fondamentale. Nous croyons encore aux repas gratuits.

  • Quand le Canada ouvre grand ses portes, on pense que c’est un cadeau.
  • Quand on nous envoie de l’aide humanitaire, on pense que c’est une faveur.
  • Quand on nous accorde des passeports occidentaux, on croit que c’est une chance.

Mais nous ne nous posons jamais la question essentielle : Quel est le prix de tout cela ?

  • Le prix en argent?
  • Le prix en temps?
  • Le prix en effort?
  • Le prix en conséquences à long terme ?

Les élites africaines ont sacrifié l’avenir de leur descendance

À force de croire aux "cadeaux", une génération entière d’élites africaines a sacrifié ses terres, ses ressources et même son avenir en Occident. Ils ont troqué un héritage durable contre des promesses éphémères. Ils pensaient recevoir un repas gratuit. Mais la facture arrive toujours tôt ou tard.

Mais bon… je sais déjà que certains mbenguistes vont encore me dire que leurs enfants seront différents, qu’ils ne seront pas comme ces jeunes Noirs perdus en Occident.

Mais il n’y a pas d’exception à la règle. Le prix des repas gratuits finit toujours par être payé… parfois par ceux qui n’ont même pas demandé à manger. There’s nothing like a free lunch! Si tu n’arrives pas à comprendre cette leçon simple, je ne sais pas ce qu’on peut encore faire pour toi.


Barberaz 🇫🇷 

Le piège invisible de l’immigration : quand la diaspora perpétue la dépendance

 Ce matin, j’ai fait du café soluble. Et en versant de l’eau chaude sur le café, une odeur particulière s’est dégagée. Une odeur qui m’a ramené à de très vieux souvenirs—comme seul l’odorat sait le faire.

Ces souvenirs, c’était l’image de moi, plus jeune, passant quelques jours chez "les riches" de ma famille, à Bonanjo ou Bali. Moi, le petit garçon de la Cité des Billes à Bilonguè, au milieu des pauvres, où le petit déjeuner se résumait à des beignets-haricots-bouillie ou du pain-haricot acheté quelque part au quartier. Le café, ce n’était pas notre truc. Mais chez les riches, c’était une autre histoire.

Une habitude importée

En me replongeant dans ce souvenir, je me suis rendu compte d’un autre détail. Tous ces "riches" avaient un point commun : ils avaient vécu en Occident. Cette habitude du café soluble au petit déjeuner n’était clairement pas camerounaise. C’était une importation culturelle, un rituel étranger qu’ils avaient adopté là-bas et qu’ils avaient ramené ici, en Afrique. Et c’est là tout le piège de l’immigration.

Quand l’Occident s’installe en Afrique, par ses propres enfants

Même ceux qui reviennent après des décennies en Occident, ceux qui ont gardé leur passeport ndolè, ne rentrent jamais vraiment seuls. Ils ramènent avec eux un Occident qu’ils ont souvent fui, un Occident qu’ils n’ont jamais vraiment quitté.

👉 Leur mode de vie change.
👉 Leur alimentation change.
👉 Leur manière de penser change.

Et sans même s’en rendre compte, ils deviennent les plus grands ambassadeurs de la culture occidentale en Afrique. Pire encore, leur potentiel de nuisance est supérieur à celui des blancs eux-mêmes. Car eux, ils parlent notre langue, ils sont de notre sang, ils ont notre confiance.

La preuve : l’éducation de leurs enfants

La plupart de ces riches africains chez qui je passais mes vacances ont tous fini par envoyer leurs enfants étudier en Occident. Pourquoi ? Parce que, selon eux, "il n’y a rien de mieux que Harvard, la Sorbonne et compagnie.” Plutôt que de construire une Afrique plus forte, ils ont préféré reproduire l’Occident ici. Et quand ils n’ont pas réussi, ils ont tout simplement expédié leurs enfants là-bas. Parce que l’Occident reste leur modèle ultime.

Le piège de la diaspora dans le développement africain

Chaque fois que je vois un politicien africain vanter ses liens avec la diaspora, je me demande s’il réalise vraiment l’impact de cette "élite" sur notre dépendance aux grandes puissances. Parce qu’en réalité, beaucoup de ceux qui reviennent ne viennent pas construire l’Afrique… ils viennent installer une succursale de l’Occident sous nos tropiques.


Barberaz 🇫🇷

Et si on repensait la gestion des deuils pour bâtir un avenir meilleur ?

Aujourd’hui, je suis tombé sur une vidéo d’un entrepreneur camerounais qui parlait du fléau que représentent les funérailles pour les hommes d’affaires camerounais. Ça m’a beaucoup fait sourire, parce qu’on aurait dit qu’il m’avait entendu tenir ce débat quelque part et qu’il se contentait de le répéter pendant son interview, tant nos points de vue se ressemblaient.

Quand j’ai commencé à soulever cette question dans mon entourage il y a quelques années, certains m’ont dit que j’exagérais. Mais honnêtement, je n’arrive toujours pas à comprendre cette situation.

Nous sommes dans un pays où tout est à faire, où on ne travaille déjà pas assez, mais chaque week-end, des milliers de personnes prennent la route pour assister à un deuil. Résultat :

  • Des centaines de travailleurs absents pendant deux à trois jours pour une seule personne décédée.
  • Des milliers d’heures de travail perdues chaque semaine.
  • Des millions de francs CFA dépensés en transports, en boissons et en distractions… au lieu d’être investis dans le développement personnel et collectif.

Si tu n’as jamais été chef d’entreprise au Cameroun, tu ne peux pas mesurer l’ampleur du problème.

Dans des secteurs comme la restauration ou le commerce, où l’activité ne s’arrête jamais, les absences pour cause de funérailles sont une véritable plaie. Un entrepreneur camerounais voit chaque mois ses employés demander des permissions pour des deuils. Un technicien qui devait livrer un projet en 5 jours mettra 10 jours, car entre-temps, il est allé au village enterrer quelqu’un. Et après, on s’étonne que les délais ne soient jamais respectés.

Nous avons besoin de travailler PLUS, pas MOINS !

Je le dis souvent à mes collaborateurs : si ça ne tenait qu’à moi, nous devrions travailler TOUS les jours pour rattraper notre retard sur les autres nations. Mais non. On ne travaille déjà pas assez. Et on gaspille encore le peu de jours que nous avons… dans des deuils à répétition. Parfois même pour des personnes que nous n’avons jamais connues.

Nous sommes prêts à risquer nos vies sur la route chaque week-end pour enterrer un inconnu, mais nous sommes incapables de nous unir pour soutenir un projet d’un frère ou d’une sœur bien vivant.e.

Est-ce vraiment la tradition ?

Quand j’en parle, on me dit : "Tu es contre la tradition.” Mais soyons sérieux… Depuis quand la tradition consiste-t-elle à enrichir les producteurs d’alcool ? Parce qu’on sait très bien où part le plus gros des dépenses funéraires. Et on sait aussi que l’argent de cet alcool ne reste même pas au pays.

Et si on repensait nos traditions ?

Pourquoi ne pas organiser des deuils en cercle restreint, dans la stricte intimité familiale ? Pourquoi, au lieu de dépenser des fortunes en voyages et en boissons, ne pas envoyer directement cet argent à la famille endeuillée pour l’aider à couvrir les frais ? 

Temps + Argent = Ressources précieuses. Si nous devons nous séparer d’une des deux, mieux vaut donner de l’argent et garder le temps pour travailler et construire notre avenir.

Ma position est claire.

🚫 Je n’assiste plus aux veillées funèbres organisées sur la voie publique.
🚫 Je limite au strict minimum mes déplacements pour des funérailles.
Et j’espère que quand mon tour viendra, tu ne perdras pas des jours de travail pour me "rendre hommage”. Si tu veux vraiment me prouver que tu m’appréciais, travaille deux fois plus pour ce pays en mon honneur.


Barberaz 🇫🇷 

Le mythe des marchés saturés : il y a toujours une place pour toi

La plupart du temps, on se dit que certains secteurs d'activités sont saturés et qu'il ne serait pas possible de s'y faire une place tellement ces secteurs comportent des acteurs très bien implantés. Je pense par exemple au secteur des smartphones. Quand on voit la puissance d'une entreprise comme Apple ou même de ses challengers Samsung ou Huawei, on pourrait se dire que les dés sont jetés. Qu'il n'y a plus de place pour personne sur ce secteur. Du moins, les nouveaux venus devraient se contenter des miettes laissées par ces géants.

Mais ce que l'on oublie souvent, pour continuer sur le même exemple, c'est qu'une entreprise comme Huawei est venue trouver les 2 autres géants sur le marché quand tout le monde se disait déjà qu'il n'y avait plus de place pour personne. Et si on remonte un peu plus loin dans le temps, nous nous rappellerons qu'Apple est rentré sur ce marché à une époque où Nokia et BlackBerry laissaient à croire qu'il n'y avait plus de place pour personne.

Et ce phénomène est exactement le même que nous pouvons observer au cours de l'histoire. Il y a quelques années encore, certaines personnes étaient persuadées que personne ne pourrait déclasser les USA à la tête du monde. Aujourd'hui, cette certitude l'est de moins en moins. Exactement comme il fut un temps où Rome ne pouvait s'imaginer n'être pas le centre du monde.

Quelle que soit la puissance des acteurs en face de toi, ne la prends pas pour une fatalité. Aucune suprématie n'est éternelle et certaines positions dominantes sont beaucoup plus fragiles qu'elles n'en ont l'air. Elon Musk nous l'a démontré à maintes reprises avec ses entreprises qui, en quelques années, ont réussi à fragiliser les positions d'acteurs historiques.

Mais même si tu n'as pas tout le potentiel d'innovation d'un Elon Musk, rappelle-toi qu'il y a un élément qui fera toujours la différence. Un élément qui est l'égalisateur universel. Qui permet aux petits comme toi et moi de pouvoir se faire une place à la table des grands même quand plus personne n'y croit. Cet élément, c'est ta façon de traiter les gens. Le soin que tu apportes au service client. La candeur que tu mets dans tes interactions avec les autres. Car c'est souvent le point faible de tous les grands. Plus ils grossissent, plus ils se croient immortels et moins ils mettent de compassion dans leurs relations avec les autres. Et là réside notre opportunité à nous tous, les petits qui commençons à peine et voulons nous faire une place au soleil.

Tout ceci pour te rappeler que tu es muni d'un super pouvoir, d'un super pouvoir qui pourrait te propulser toi aussi au sommet de toute entreprise qui sera tienne. Et ce super pouvoir, c'est le soin que tu portes à toutes tes interactions de près ou de loin. Ton service client.


Barberaz 🇫🇷 

Passeports occidentaux : la fuite silencieuse des élites africaines

Je sais que tu vas encore dire que j'exagère. Mais bon, comme disait Jiddu Krishnamurti, "Ce n'est pas un signe de bonne santé que d'être bien adapté à une société profondément malade."

Donc je le demande une fois de plus, qu'est-ce qui s'est passé pour que sur la plupart des vols en provenance et à destination de l'Occident en Afrique Noire, la plupart des Noirs aient des passeports occidentaux ? Je suis le seul qui trouve cette situation choquante et anormale ? Si ce n'était qu'une seule personne en passant, ça pourrait se comprendre. Mais quand c'est une aussi grande partie des passagers, ça soulève quelques interrogations.

Je ne peux m'empêcher de me demander ce que nos ancêtres penseraient de cette situation. Nos ancêtres qui se sont battus contre l'esclavage, nos ancêtres qui ont été arrachés à leurs terres de force pour découvrir un territoire qui pour eux ne rimait qu'avec souffrance et travail forcé. Je ne peux m'empêcher de me demander ce qu'ils penseraient de nous, les descendants directs de ceux d'entre eux qui ont échappé à cette barbarie, qui sommes prêts à tout pour obtenir les nationalités de leurs bourreaux.

Et surtout, je me demande ce que l'histoire retiendra de nous. De cette génération d'Africains qui aura passé toute sa vie à essayer de s'adapter à une société profondément malade. À une société où même les plus intelligents courent après la facilité. À une société où des gens qui sont allés quémander des passeports ailleurs te diront qu'ils aiment l'Afrique plus que toi. À une société où ça ne gêne personne que ceux à qui on a remis les clés du village (la sagesse, la richesse…) aient décidé d'aller être des larbins sous d'autres cieux, envahis par l'envie et la paresse.


Lomé 🇹🇬 

Eto’o mon héros

Ça fait des mois que je dois faire ce texte, 6 mois plus exactement. Mais je vais mettre la procrastination où ? C'est aujourd'hui ou jamais car je ne pourrais trouver meilleur jour que celui de son anniversaire pour rendre hommage à un de mes héros, Samuel Eto'o.

Pourquoi je considère Eto'o comme mon héros ?

J'ai l'habitude de dire que chaque membre d'une communauté en est son ambassadeur. Si certains peuples jouissent d'une meilleure publicité que d’autres, ce n'est pas forcément parce qu'ils sont meilleurs que les autres, mais souvent parce que les ambassadeurs de cette communauté font le travail nécessaire pour porter la communauté tout haut. Et Eto'o fait partie de ces Camerounais qui contribuent largement à redorer le blason de notre pays. Il fait bon d'être un Camerounais du pays de Samuel Eto'o. Par ses actes et ses prises de position, il a su nous rendre fiers à travers le monde. Pas seulement en tant que Camerounais mais aussi en tant qu'Africains en général.

Eto'o le footballeur

Plus jeune, je n'étais pas forcément un grand fan de son style de jeu. Je ne l'aurais certainement pas mis dans le top 3 de mes footballeurs préférés. Mais comme on dit, les goûts et les couleurs ne se discutent pas. Cependant, ceci n'enlève rien au grand footballeur qu'il a été. Qu'on l'aime ou pas, ses chiffres parlent pour lui. Et sur les chiffres, on ne peut qu'être unanime. Parti de très loin, avec beaucoup moins de chance que les autres, il a su se battre comme un lion pour se hisser tout au sommet de sa discipline.

Eto'o l'homme

L'homme n'est pas parfait comme la plupart d'entre nous d'ailleurs. Cependant, la plupart de nous qui lui jetons la pierre pour telle ou telle gaffe aurions certainement fait pire dans sa position. Ce que très peu d'entre nous auraient pu faire par contre, c'est faire preuve d'autant de courage. Et c'est certainement l'aspect de sa personnalité que j'admire le plus. Il a toujours su se faire entendre, se faire respecter et surtout montrer l'exemple à toute cette jeunesse africaine en panne de rêves. Devant toutes les attaques qu'il subit depuis son accession à la présidence de la Fecafoot, il aurait pu plier et ravaler tous les rêves de grandeur qu'il avait pour son pays, comme le font la plupart des gars de la diaspora qui reviennent au pays avec un projet et se heurtent à des obstacles. Non, ce n'est pas Eto'o ! Il tient bon. Luttant de toutes ses forces et surtout toujours dans le respect des autres et des institutions pour aller jusqu'au bout de son projet.

Le plaisir serait tout mien de pouvoir le rencontrer un de ces quatre pour une discussion. Pourquoi pas comme invité du podcast Yes We Kam. Afin de lui poser toutes les questions qui me passent par la tête et recueillir le maximum de conseils possibles. Qui sait, peut-être m'expliquera-t-il pourquoi sa famille ne vit pas avec lui au Cameroun. Car c'est selon moi l'une de ses plus grosses fautes de communication ces dernières années. Imagine un Eto'o accompagnant ses enfants chaque matin dans une école de la place. Le signal serait plus fort.

En attendant, je lui souhaite longue vie et qu'il continue de se battre comme il le fait pour ses rêves, pour son pays. C'est selon moi l'un des moyens les plus efficaces de réapprendre à cette jeunesse à rêver.

Joyeux Anniversaire Papa Eto’o


Lomé 🇹🇬 

L'illusion du développement en Afrique : infrastructure vs éducation

Le constat est quasiment le même dans tous les pays africains que je visite. Malgré des efforts de développement et de construction d'infrastructures des gouvernements, tu as toujours l'impression qu'une grande partie de la population est totalement larguée. Et plus le pays fait des efforts de développement, plus le contraste est fort. Un peu comme si on était allé chercher des pygmées dans leurs forêts pour les faire vivre à New York.

Et le pays dans lequel ce contraste m'a le plus frappé jusqu'à présent est le Rwanda. Ça se voit que les dirigeants ont fait un effort considérable pour faire d'une ville comme Kigali un petit paradis. Les routes sont nickels, les bâtiments administratifs sont beaux et propres. L'architecture des maisons, du moins celles qui bordent les grandes routes, est juste extraordinaire. Et contrairement à une ville comme Douala, tu ne verras pas de chantier abandonné. Tu as vraiment l'impression d'être dans un pays développé. Mais dès que tu commences à discuter avec la population, monsieur lambda, tu tombes des nues.

J'ai l'impression qu'en Afrique, nous sommes vraiment en train de prendre le chantier du développement par le mauvais bout. La plupart de nos élites qui ont parcouru le monde et ont vu des choses extraordinaires ailleurs veulent reproduire la même chose ici. Des monuments à couper le souffle, des bâtiments à l'architecture futuriste, des autoroutes à plusieurs voies et j'en passe. Mais très peu essaient vraiment de comprendre tout ce qui est sous-jacent à ce développement qu'ils observent ailleurs. Nous sommes dans ce que j'appelle l'effet Gatsby. On imite la forme sans vraiment comprendre le fond.

Il y a quelques semaines, je discutais avec un grand frère de la précédente génération au Cameroun. Et il m'expliquait qu'à l'époque du président Ahidjo, le Cameroun était un pays à économie intermédiaire. Qu'il y avait énormément de choses que nous faisions sur place en termes d'industries de transformation. Il m'a parlé du système de transport urbain et interurbain qui était assez développé. Il m'a parlé des bâtiments qui avaient été construits. Et sur ce dernier point, nous pouvons tous le remarquer. La plupart des bâtiments aux architectures impressionnantes au Cameroun ont été construits avant notre génération.

Le problème, c'est qu'il semblait dire, comme la plupart des Camerounais d'ailleurs, que le problème était le régime en place. Le nouveau régime aurait détruit toutes ces avancées et nous aurait fait faire des grands pas en arrière pendant que les autres pays à économie intermédiaire comme la Corée du Sud sont aujourd'hui sur le toit du monde. Je ne crois pas vraiment en cette théorie.

Je ne connais pas de pays au monde où il n'y a pas de divergence de points de vue parmi les leaders qui se suivent. Hier encore, je parlais du cas du Ghana où le président sortant a annoncé l'ouverture des frontières à tous les Africains et le président entrant y a mis son véto. En début d'année, après qu'il ait pris le pouvoir aux USA pour la deuxième fois, Donald Trump a commencé par défaire une bonne partie du travail fait par son prédécesseur. Et c'est ce que nous pouvons observer un peu partout en Occident. Sauf qu'ailleurs, les changements de régime ne font pas faire des sauts en arrière. Quel que soit le régime en place, ces pays continuent d'avancer et de se développer.

Il y a certainement beaucoup d'autres raisons pour justifier nos cas spécifiques en Afrique, mais je pense que l'effet Gatsby joue un très grand rôle. Quand j'étais au Rwanda, je me suis demandé comment est-ce que toutes ces infrastructures construites par le régime actuel allaient pouvoir lui survivre. Parce que le meilleur moyen de faire prospérer quelque chose n'est pas de constamment le rénover, mais surtout de bien l'utiliser, moins le détruire. Et ça, ça demande de connaître le mode d'emploi.

Il y a quelques années, j'avais déjà fait le constat qu'en Afrique, et au Cameroun particulièrement, nous avions un gros problème d'entretien. Que ce soit dans le public comme dans le privé. Nous nous empressions de construire de belles choses qui, quelques années plus tard, tombaient en ruine. Mais à ce moment-là, je n'avais pas encore compris quelle était la cause véritable de ce phénomène. Et aujourd'hui, je pense l'avoir trouvée. C'est un problème d'éducation !

Tu peux faire l'expérience de ton côté et tu le verras. Mets à disposition le même appareil électroménager, un téléphone, une voiture ou même une maison à deux individus, l'un étant plus éduqué que l'autre. Les effets mis à disposition des personnes les plus éduquées auront une plus longue durée de vie. C'est aussi la raison pour laquelle, plus tu vieillis, moins tu fais de gaffes. Moins tu casses de plats ou de verres, moins tu tombes et plus longtemps tu gardes tes affaires. Entre un enfant et un adulte, il y a un fossé en termes de connaissances.

Et dans un monde qui se développe de plus en plus vite et qui est de plus en plus mondialisé, un monde où il est extrêmement facile de savoir ce que fait son voisin, l'Afrique est en train de tomber dans le piège du suivisme. Nous voulons avoir ce qu'ont les autres sans même chercher à comprendre comment ils ont fait pour y arriver et sur quoi toutes ces avancées reposent. Du coup, tu as tout un tas de Noirs, surtout nos amis de la diaspora, qui nous disent que nous devons avoir des métros, des trams, que nous pouvons construire des centres-villes à la Manhattan, qui veulent qu'on ait plus de routes.

Toutes ces choses, oui, je suis d'accord qu'on devrait aspirer à les avoir. Mais nous devons faire les choses dans l'ordre. Prenons le cas de la route. La route est une bonne chose, je ne dirais jamais le contraire. Mais je ne fais pas partie des gens qui se plaindront en Afrique du manque de routes. Car de tous les pays que j'ai visités en Afrique, je n'en ai pas vu un où la route était utilisée à bon escient, où les usages étaient respectés, où les usagers se rendaient même compte du danger que cela pouvait représenter pour nos vies. Dans certains pays, nous avons des routes certes, mais elles ressemblent toujours à des pistes de forêts. Des usagers qui roulent du mauvais côté, à contre-sens, à la mauvaise vitesse. Des piétons qui traversent sans regarder. Des commerçants qui viennent vendre sur le trottoir. Nous avons voulu avoir les routes comme les autres mais nous avons sauté l'étape qui consiste à éduquer la population sur leur bon usage.

Notre problème, c'est l'éducation. Et tant que nous ne travaillerons pas à le résoudre, nous n'irons pas bien loin dans la course au développement. Essayer de se développer sans éduquer la population, c'est l'équivalent de construire une maison sans fondations. C'est ce que nous sommes en train de faire un peu partout en Afrique aujourd'hui. C'est ce que nos parents ont fait après les indépendances.

Quand je parle d'éducation, je ne parle pas seulement de diplômes ou d'illettrisme, bien que ça fasse partie du lot. Mais je parle aussi de tout ce qui va avec : du vivre-ensemble, du bon sens, de l'ouverture d'esprit, de l'esprit critique. Cette éducation, elle ne peut pas être le panache de l'école seule. Nous sommes tous concernés, en famille, en entreprise, en associations. Les plus avancés ont le devoir de tenir la main de ceux qui sont encore en arrière et de leur faire passer un cap. Cette éducation, c'est ce que nous apprenons à nos employés en tant que chefs d'entreprise. C'est ce que nous apprenons aux membres de notre famille, à nos amis qui n'ont pas eu la chance de vivre sous d'autres cieux ou d'utiliser les nouveaux outils qui nous sont proposés. Cette éducation, c'est pointer du doigt ce qui fait marcher les choses ailleurs au lieu de toujours se plaindre du fait que nous n'avons pas certaines choses chez nous. Cette éducation, c'est apprendre tous ensemble l'esprit d'entretien, l'importance du bien commun, la patience dans toute chose et surtout le respect d'autrui.

Ce ne sont pas les bâtiments, les routes ou les infrastructures qui font une nation développée. Non, c'est le niveau d'éducation de son peuple. Nairobi est une ville beaucoup plus développée, en termes d'infrastructures, que beaucoup de villes occidentales que j'ai pu visiter. Mais bizarrement, je ne la mettrais pas forcément au-dessus de ces villes occidentales. Pourquoi ? Parce qu'il y a ce petit quelque chose qui manque. Tu as juste l'impression, comme pour le cas des villes comme Kigali ou d'autres grandes capitales africaines, que toutes ces infrastructures n'ont pas été faites pour la population, mais d'abord pour en mettre plein la vue aux autres, aux touristes et toutes ces autres personnes que nos dirigeants envient tellement de l'autre côté.


Accra 🇬🇭  

Visa pour le Ghana : l’annonce de libre circulation retardée !

En fin d'année 2024, le président sortant du Ghana, Nana Akufo-Addo, annonçait avoir signé un décret qui, dès le 1er janvier 2025, ferait du Ghana le 5e pays africain après le Rwanda, les Seychelles, le Bénin et la Gambie, à ouvrir ses frontières pour tous les autres pays africains. Tout détenteur de passeport africain pourrait dorénavant s'y rendre sans visa.

Une décision que j'ai accueillie avec beaucoup de joie. Car si nous voulons nous réapproprier notre continent, il est primordial que nous commencions par casser ces barrières artificielles qui nous ont été imposées par les autres. Il est souvent plus facile pour un non-Africain de se déplacer en Afrique que pour un Africain. Et pourtant, en étudiant un tant soit peu les dynamiques des passeports dans le monde, on se rend vite compte que la puissance d'un passeport (le nombre de pays auquel il donne accès sans visa) n'est pas relative à la puissance économique du pays mais à un système d'alliances. Les gens du même camp se donnent mutuellement accès à leurs pays sans visa. Et nous en Afrique, on refuse encore de constituer notre camp. Comme nos enfants qui vont quémander les passeports ailleurs, on continue de croire que les autres pourront nous aimer mieux que nos frères, nos semblables.

En ce qui concerne le Ghana, si comme moi tu avais prévu de profiter cette année de ce changement dans leur politique de visa, il va falloir revoir tes plans. Car bien qu'annoncé comme devant entrer en vigueur en début d'année, il faudra attendre encore un peu pour pouvoir rentrer au Ghana sans visa, même muni d'un passeport africain. Certainement une divergence de point de vue entre l'ancien président et le nouveau qui est entré en fonction le 7 janvier. 

En attendant, l'Afrique continue d'être toujours aussi balkanisée.


Accra 🇬🇭