Ceux qui disparaîtront après les élections

Nous sommes de nouveau à cette période de la décennie. Cette période où on se déchire parce que les uns souhaitent un changement à la tête du pays, les autres veulent y voir quelqu'un de bien précis, certains ne veulent que rien ne bouge et d'autres encore ne sont ni d'accord avec les uns ni avec les autres. Cette période de la décennie où certains dont on ne soupçonnait plus l'existence sortent des buissons pour nous donner des leçons de morale, pour nous expliquer à quel point ils aiment ce pays et nous dire que nous avons tort de ne pas être de leur camp.

C'est peut-être la première fois que tu me lis ou bien tu as découvert mes textes il y a peu. Mais ce n'est pas d'hier que j'écris. Que j'écris sur mon pays, que j'écris pour partager mes expériences, que j'écris pour proposer des solutions. Cependant après 2018, j'ai fait un gros break. Un gros break parce que pour chacun de mes textes, s'il n'était pas en faveur d'un quelconque candidat ou d'un quelconque changement de façade, je recevais des insultes de part et d'autre.

Pour beaucoup de personnes de ma génération, 2018 était notre vraie première élection présidentielle. La première à laquelle nous assistions vraiment comme de vrais adultes. Et pour beaucoup de ma génération, contribuer au développement de son pays s'est résumé à pleurnicher sur les réseaux et se transformer en terroristes. Parce qu'en 2018, j'ai dit à mes potes en Occident qu'il fallait faire une différence entre le Cameroun et son gouvernement. Que le gouvernement passerait mais que le Cameroun serait toujours là après notre mort. Ils m'ont traité de collabo. De soutien du parti au pouvoir. Comme si même si c'était le cas, c'était un crime de soutenir le candidat qu'ils détestaient.

Après les élections, j'ai essayé de leur faire comprendre que si nous voulions vraiment faire évoluer les choses au pays, il était de notre devoir de se mettre à son service. Et non de continuer à pleurnicher à distance comme si nous étions encore des gamins. D'ailleurs, je leur ai fait une proposition juste après la fin des élections. Je leur ai dit que s'il y avait une chose qu'on pouvait remarquer pendant cette élection présidentielle, c'était la qualité pitoyable des tableaux dans les salles de classe de nos petits frères au pays. C'est sur ces tableaux que se faisait le décompte des voix et sur ce point nous étions tous d'accord. Ils n'étaient pas à la hauteur du pays que nous disons tant aimer. J'ai donc proposé qu'on se constitue en association, qu'on lève des fonds pour remplacer le maximum de tableaux possibles dans ces classes afin qu'à la prochaine élection on puisse voir une différence. Que le monde puisse constater un changement. Et pour ça, nous n'avons pas besoin d'attendre l'État pour le faire. Exactement comme nous n'avons pas besoin d'attendre l'État pour s'occuper des retraites de nos parents. Une proposition qui est tombée dans des oreilles de sourds, bizarrement pour des gens qui se disent patriotes.

Entre 2018 et 2025, je suis rentré m'installer au pays. J'y ai créé plusieurs entreprises, employé des dizaines de jeunes, mentoré des dizaines d'autres, lancé avec plus ou moins de succès plusieurs initiatives pour essayer à mon niveau d'apporter le changement. Et la plupart de ces personnes qui me traitaient de tous les noms sont restées en Occident, ont continué à traiter le pays de tous les noms, ont contribué à faire partir le maximum de jeunes possibles et surtout on n'a plus entendu leurs voix sur une question sociale concernant le pays. Comme le notait un post Facebook sur le candidat Joshua Osih, "ils apparaissent le jour des élections et quand ils perdent, ils repartent prendre leurs poids."

Vous aimez peut-être ce pays plus que nous, mais nous, nous y avons consacré nos vies. Nous avons décidé de travailler à sa grandeur. Et ça, nous continuerons à le faire quel que soit le candidat qui remportera cette élection. Vous allez certainement disparaître une fois de plus d'ici la fin d'année pour aller prendre votre poids. Mais nous, nous serons toujours là. Sur le terrain à essayer de faire avancer les choses du mieux que nous le pouvons. Et je ne sais pas pour les autres, mais cette fois-ci je ne prendrai aucun break. Si vous avez décidé une fois de plus de faire dans l'immondice, sachez que vous trouverez ma plume sur votre chemin. Et souvent "la plume est plus puissante que l’épée." 


Lomé 🇹🇬 

Aimer son pays, ce n’est pas un slogan, c’est un comportement

Il y a quelques jours, j'ai exprimé mon opinion sur un sujet concernant le pays et là, un pote est sorti du buisson. Un de mes nombreux amis de la diaspora comme Flavien aime à me le rappeler.

Parce que j'ai dit que c'était stupide de passer son temps à insulter son pays parce qu'on est frustré, il m'a traité de donneur de leçons et m'a dit qu'ils avaient le droit de donner leurs opinions et de traiter le pays de pays de merde. À quoi j'ai répondu qu'il était aussi de mon droit de traiter cet acte de stupide. Pourquoi est-ce qu'ils devraient donner leurs opinions et on devrait dire Amen sans rajouter un mot ?

Mais bon, le clou du spectacle, c'est quand il m'a rappelé encore une fois, parce que ce n'est pas la première fois que je l'entends, que moi et tous les gens comme moi, nous n'aimions pas le pays plus qu'eux. Tu me connais, en bon amateur de mbolé, ce n'est pas le répondant qui me fait défaut. Je lui ai d'abord rappelé que je n'ai jamais dit que j'aimais le pays plus que quelqu'un et que ce sont toujours eux qui ramènent le sujet sur la table comme s'ils avaient quelque chose à se reprocher.

Cet épisode m'a un peu fait réfléchir et je me suis demandé c'est même quoi aimer son pays. Nous avons certainement tous une façon différente de le faire et si on devait s'entendre sur une norme, on pourrait en discuter toute la vie. Pour ma part, j'aime profondément mon pays. Et toute personne qui me connaît n'a pas besoin de me le demander, tellement c'est évident. J'ai l'habitude de dire que si tout le monde devait fuir le Cameroun, je serais certainement la dernière personne à partir. Et même là, je ne suis pas sûr.

Il y a quelques années, je me disais que le seul moyen de me faire partir du Cameroun serait de m'envoyer en exil. Et depuis que j'ai lu l'histoire d'Ernest Ouandié, mon héros, je me demande si je ne serais pas capable de revenir clandestinement de mon exil comme il l'a fait à l'époque.

Pour mon pays, j'ai fait tellement de sacrifices, des sacrifices que je te raconterais certainement un jour dans un livre. Et dans un monde où les gens sont de plus en plus égoïstes et égocentriques, je suis prêt à faire le sacrifice ultime pour mon pays.

Aimer son pays pour moi, c'est travailler pour lui, c'est être à son service, c'est le faire passer avant tout. Car pour moi, le Cameroun passe avant tout. Avant tout ce que tu peux imaginer. Oui, même ce que tu imagines en ce moment. Du coup, je n'ai même pas besoin d'essayer de faire un concours avec quelqu'un sur qui aime le pays plus que qui. Mon pays, je l'aime juste et ça, tu peux certainement le voir dans mes actes.

Des personnes comme moi qui aiment profondément le Cameroun, je sais qu'il y en a des centaines, voire des milliers même si je ne les connais pas tous. Chacun à sa façon, à son intensité. Et des personnes qui prétendent aimer ce pays, par contre, il y en a des millions. Certains l'aiment d'un amour maladroit, "comme ce bon père de famille en levrette sur sa fille" pour paraphraser Youssoupha dans "La vie est belle."

Je me suis donc dit que j'allais demander à ChatGPT de nous donner quelques indices sur c'est quoi aimer son pays. Je lui ai posé la question suivante : "Si je te demandais de me donner une dizaine de points de choses qu'une personne qui aime son pays ferait et ce qu'il ne ferait pas, qu'est-ce que tu me donnerais comme points s'il te plaît ?" Et voici sa réponse :

Bien sûr ! Voici une liste simple et claire de ce que ferait et ne ferait pas une personne qui aime sincèrement son pays :

Ce qu'une personne qui aime son pays ferait :

      • Respecter les lois tout en cherchant à les améliorer si elles sont injustes.
      • Valoriser la culture locale, ses langues, ses traditions et son histoire.
      • Contribuer au développement du pays à travers son travail, ses idées et ses initiatives.
      • Encourager et soutenir les entreprises locales pour stimuler l'économie.
      • Sensibiliser aux bonnes pratiques (écologie, civisme, entraide…).
      • Agir avec intégrité dans ses fonctions professionnelles et sociales.
      • Participer à la vie citoyenne : voter, débattre, proposer.
      • Promouvoir l'unité nationale et la cohésion entre les communautés.
      • Protéger les ressources naturelles et le patrimoine du pays.
      • Inspirer les jeunes générations à croire en leur avenir dans leur propre pays.

Ce qu'une personne qui aime son pays ne ferait pas :

      • Détruire ou salir l'environnement par négligence ou égoïsme.
      • Voler les ressources publiques ou détourner des fonds destinés à l'intérêt général.
      • Critiquer sans agir, se plaindre sans proposer de solutions.
      • Dévaloriser son pays à l'étranger ou sur les réseaux sociaux sans discernement.
      • Favoriser systématiquement les produits et services étrangers au détriment des locaux.
      • Encourager les divisions ethniques, religieuses ou sociales.
      • Refuser de payer ses impôts ou chercher à frauder constamment l'État.
      • Décourager les initiatives positives ou les jeunes entrepreneurs.
      • Saper les institutions sans contribuer à leur amélioration.
      • Profiter du système sans jamais rien y apporter en retour.

En résumé, aimer son pays, ce n'est pas seulement le dire, c'est le prouver par des actes quotidiens, aussi petits soient-ils, qui vont dans le sens du bien commun et du progrès durable.

Ce n'est que l'avis de ChatGPT mais ça constitue déjà un bon début de plan de travail. À chacun de se faire son idée et si possible d'aller répondre à la question de Youssoupha dans la chanson citée plus haut : "Est-ce que c'est ça l'amour ?"


Lomé 🇹🇬 

Et si on arrêtait d’enterrer nos propres prénoms ?

Il y a quelques années déjà, j'ai décidé que tous mes enfants auraient des prénoms africains. Histoire de commencer à reconstruire cette identité africaine qui était la nôtre et qui n'a cessé d'être brisée depuis l'arrivée des Occidentaux et des Arabes sur notre continent.

À mon premier, je lui ai donné un prénom camerounais, Zowa, qui est le diminutif de mon Ndap, mon nom traditionnel. Et à mon deuxième, j'ai donné un prénom togolais, Ayité.

Depuis quelques jours, avec les enfants, nous sommes au Togo. La première fois pour Ayité. Et il y a un phénomène qui me choque. Au début, j'ai été étonné que personne ne se soit jamais retourné dans une pièce remplie quand j'appelais Ayité qui courait dans tous les sens. Une situation qui aurait été commune il y a encore quelques décennies au Togo, tellement ce prénom était répandu. Mais le pire, c'est que de plus en plus, quand j'appelle mon fils en public, des gens se tournent vers moi étonnés. Comme s'ils avaient vu un zombie. Comme s'ils étaient étonnés qu'il y ait encore des personnes qui donnent des prénoms aussi "rétrogrades" à leurs enfants.

Je peux comprendre que les autres fassent tout pour faire disparaître notre culture. Mais ce que je n'arrive toujours pas à comprendre, c'est pourquoi nous acceptons d'en être complices.


Lomé 🇹🇬 

Quitte à râler, autant se mettre au boulot

Ce week-end, j'ai fait une escapade au Bénin. Et franchement, plus je voyage en Afrique et plus je me dis que nous, les Camerounais, devrions être un peu plus humbles. Car tout ce que nous avons, c'est la nourriture et une grande gueule, entre autres pour manger cette nourriture et insulter tout le monde.

De la location de la voiture à Europcar Lomé au trajet de Lomé à Cotonou sur une distance d'un peu plus de 150 km, tout était génial. Pour une personne qui a fait Douala-Yaoundé (220 km) en voiture il y a quelques mois, c'est le jour et la nuit. Tu as l'impression qu'au Cameroun, nous n'avons pas reçu le mémo du développement. Mais bon, ce n'est même pas ça le plus important, car je sais que tout ça, ce sont des questions économiques et qu'il y a des gens qui s'endettent pour avoir des écrans 4K dans leurs salons alors que leurs moyens ne leur permettent pas. Je ne saurais donc comparer le Cameroun et ces pays sur ce point.

Cependant, la chose qui me marque toujours le plus, c'est surtout l'attitude des gens. Au Cameroun, j'ai souvent l'impression que je suis en guerre avec tout le monde, des officiers du maintien de l'ordre aux différents acteurs de la société civile. Tout le monde essaie de prendre le dessus sur tout le monde. Ici, j'ai pu faire mon escapade sans encombre. Personne pour essayer de m'intimider, me menacer, me faire perdre du temps ou m'extorquer de l'argent. Le genre de road trip que je fais souvent en Europe. Tu prends ta voiture, tu roules sans problème aller et retour sans avoir à avoir une relation quelque part. Mais bon, peut-être que c'est mon expérience qui est exceptionnelle.

Je sais qu'après avoir lu jusqu'ici, certains diront que c'est le gouvernement qui tue le pays. Mais je suis toujours contre cet avis. Je ne suis pas sûr que les dirigeants de ces pays soient meilleurs que les nôtres. Et je sais de fait que même dans ces pays, les populations se plaignent de leurs dirigeants. Ce que je crois, c'est que chaque peuple est à l'image de ses dirigeants. D'ailleurs, c'est parmi le peuple que les dirigeants sont choisis. Ils viennent rarement d'ailleurs. Selon moi, notre problème au Cameroun, c'est que nous n'avons pas assez le sens du bien commun. C'est chacun pour soi. À la moindre occasion, nous sommes prêts à prendre avantage de l'autre pour de l'argent, la gloire ou juste être mieux vus aux yeux des autres. Ce n'est pas un comportement dans lequel peut se construire un développement.

Et autant je pense que nous sommes tous coupables de notre sort, autant j'en veux un peu plus à toutes ces personnes comme moi qui sont un peu plus éduquées que les autres, qui avons eu le privilège de voir comment ça se passe sous d'autres cieux. Car c'est à nous que revient la tâche de tirer les autres vers le haut. Mais au lieu de ça, on préfère aller quémander des passeports en Occident et aller sur internet jeter notre venin sur tous ceux qui essaient avec leurs moyens bancals de faire avancer les choses. Si tous ces Camerounais qui ont tant reçu, tous ces Camerounais qui ont pu bénéficier d'une éducation d'élite, tous ces Camerounais qui ont pu voyager à travers le monde, tous ces Camerounais qui viennent de familles fortunées, tous ces Camerounais dont les parents ont eu la chance d'avoir un poste de fonctionnaire dans le gouvernement, tous ces Camerounais qui ont eu la chance de s'en sortir dans la vie dans les arts, la musique, l'ingénierie ou autre. Si tous ces Camerounais décidaient de se mettre au service du pays au lieu de se plaindre en longueur de journée et souvent à des milliers de kilomètres, je suis persuadé que nous serions certainement l'un des pays les plus puissants d'Afrique. Car s'il y a bien une chose que nous avons et que je ne vois pas en abondance dans tous ces pays africains que j'ai la chance de visiter, c'est notre esprit de créativité, notre combativité, notre résilience, bref le "Hemlé" comme on l'appelle chez nous.

Si tu fais partie de la classe des Camerounais que j'ai énoncée ci-dessus, je t'exhorte à te mettre au travail. Et si tu ne sais pas par où commencer, n'hésite pas à me contacter et qui sait, peut-être serais-tu intéressé de rejoindre cette armée du changement que nous sommes en train de mettre sur pied pour le développement de notre pays.


Lomé 🇹🇬 

Hier déportés, aujourd’hui volontaires. Quelle ironie!

Aujourd'hui, j'ai fait un saut à Ouidah, plus précisément à La Porte du Non-Retour. L'un des ports importants de la traite négrière. J'ai pris un guide qui nous a un peu expliqué le différent parcours des esclaves depuis leur capture à l'intérieur du continent jusqu'à la porte et le départ pour Gorée, d'où la traversée était enclenchée pour les Amériques.

Si je n'ai pas laissé échapper une larme, c'est sûrement parce que j'étais avec les enfants. Néanmoins, l'émotion était aussi forte que quand j'ai visité le mémorial du génocide à Kigali en décembre dernier.

Et la question qui me passe par la tête chaque fois que je suis aussi près de notre histoire est de savoir ce qui a bien pu se passer entre-temps pour que nous soyons aujourd'hui les grands défenseurs des bourreaux de nos parents d'hier. Hier, nos ancêtres étaient emmenés de force en Occident. Un trajet qui coûtait la vie d'au moins la moitié de toutes les personnes qui étaient capturées. Les personnes souvent les plus en forme du continent. Et aujourd'hui, nous sommes prêts à vendre le continent, risquer nos vies pour rejoindre ce même Occident. Et souvent encore, les plus forts et les plus intelligents d'entre nous.

Mais bon, peut-être que les Noirs sont vraiment venus sur cette Terre pour être les bouffons des autres. Une position que nous avons embrassée avec brio.


Aného 🇹🇬 

Investir pour nos enfants ? Personne n’est chaud.

Un autre texte au restaurant, devant mon verre de Possotomè accompagné de citrons. Sur la belle plage de Cotonou qui est en plein remodelage par le pouvoir en place. En train de regarder les enfants jouer dans une petite aire de jeux aménagée par le restaurant. Un restaurant family-friendly comme me l'a signalé Yannick quand il me recommandait cette adresse. Et c'est le sujet du jour.

J'ai commencé à le remarquer depuis Lomé et ça s'est confirmé ici à Cotonou. Comparées à Douala, ces villes sont beaucoup plus family-friendly. Tu as beaucoup plus d'endroits que tu peux visiter avec les enfants. Beaucoup d'attractions pour les enfants. Et même beaucoup de restaurants, comme celui-ci dans lequel je fais ce texte, qui aménagent des espaces pour des familles et des enfants.

Ça fait à peine 10 jours que nous sommes arrivés ici, mais j'ai l'impression que ça fait déjà 1 mois, tellement nous avons fait de choses entre Lomé et Cotonou. Je ne sais pas si on aurait pu faire autant de choses à Douala. Ou peut-être que c'est moi qui ne connais pas bien ma ville.

Ceci fait partie des raisons pour lesquelles je ne suis jamais d'accord avec tous ces pleurnichards qui se plaignent du gouvernement pour justifier la situation de notre pays. Certes, le gouvernement a sa part de responsabilité. Mais avant de lui jeter la pierre, il faudrait au moins que nous ayons fait notre part.

Quand une personne fait souvent beaucoup de bruit sur internet en disant qu'elle a investi au pays, la plupart du temps c'est un snack qu'elle a ouvert. Ou à la limite, elle a mis des meublés par terre. Tu vois de qui je parle. Les gens qui font beaucoup de bruit et qui vivent ailleurs là. Et quand tu leur demandes pourquoi ils ne veulent pas s'installer au pays, parmi les raisons ils te disent qu'il n'y a rien au pays pour les enfants. Aucune activité. Que ce soit des activités extra-scolaires ou des activités d'amusement. En gros, ils vont venir lancer des snacks, construire des meublés et c'est le gouvernement qui va créer des lieux family-friendly pour leurs enfants. Comme si quand ils vont à Disneyland Paris c'est le gouvernement français qui l'a construit. Ou bien c'est le gouvernement qui lance toutes ces chaînes de restauration family-friendly dans ces pays d'Occident dans lesquels ils vivent.

Comme je dis souvent, nous sommes à l'image de nos dirigeants, égoïstes et égocentriques. Chacun ne pense qu'à son ventre et son profit. Personne pour la communauté. L'une des raisons pour lesquelles, malgré le fait que nous soyons dans un pays où la moyenne d'âge est de 18 ans, personne d'entre nous ne veut investir dans des business destinés à cette jeunesse qui représente plus de la moitié de la population. Chacun cherche son argent, dans la bière, le sasn-caleçon, les produits éclaircissants, les perruques, les jeux de hasard et tout ce qui peut donner de l'argent rapidement.


Cotonou 🇧🇯 

Libre circulation en Afrique de l’Ouest ? Pas forcément pour les véhicules

Un autre texte dans un restaurant. Je sens que tu risques de commencer à te faire une idée bizarre de moi. Si ce n'est pas déjà le cas d'ailleurs. Bref, c'est l'heure de notre rendez-vous quotidien et aujourd'hui je suis à la source de Possotomé, au Bénin. Plus précisément à Cotonou.

À la frontière entre le Togo et le Bénin, j'ai dû payer un laissez-passer à la douane béninoise. Laissez-passer qui me donne le droit de circuler pendant 30 jours sur le territoire béninois avec une voiture immatriculée au Togo. Et tu me connais, c'est le genre de chose qui m'indigne profondément.

Nous parlons d'intégration régionale, de libre circulation des personnes dans la sous-région, mais nous réussissons quand même à instaurer des mini-taxes qui vont dans le sens contraire de ce que nous recherchons. C'est vrai que la taxe ne coûte que 7000 FCFA et est valable un mois, mais même à ce niveau, une taxe pareille peut à grande échelle ralentir le déplacement des personnes d'un pays vers l'autre. Surtout qu'apparemment le Togo fait pareil en instaurant une taxe un peu plus élevée à 10 000 FCFA.

Dans des pays où le péage coûte 500 F, une taxe pareille à 7000 F, c'est juste prohibitif. Je m'imagine un peu ce que ce serait si, pendant que je vivais en France, je devais débourser une cinquantaine d'euros chaque fois que j'entrais dans un autre pays européen avec ma voiture. Je crois que j'aurais certainement fait beaucoup moins de voyages.

Mais bon, quelqu'un lira encore ce texte quelque part sur son canapé et dira que j'aime trop donner des leçons aux gens.


Cotonou 🇧🇯 

La guerre économique sur nos tables : ouvrons enfin les yeux

J'étais en train d'écrire mon texte du jour tranquillement. J'avais déjà même fini le premier paragraphe, jusqu'à ce que les enfants viennent me mettre la pression pour commander. Eh oui, tu l'auras compris, encore moi avec mon ordinateur au restaurant.

Alors, j'ai ouvert le menu et je suis allé à la page des boissons pour commander mon Possotomè, comme je l'avais fait la dernière fois. Car je suis dans ce même restaurant où j'avais découvert cette eau gazeuse il y a quelques jours. J'y suis revenu avec les enfants parce qu'il propose une aire de jeux. Quelque chose que je trouve que Lomé a vraiment en plus par rapport à une ville comme Douala. Il y a beaucoup plus de possibilités de se divertir avec les enfants sans aller dans les snacks. Mais bon, ça, c'est le sujet d'un autre jour. Revenons à notre sujet du jour.

Cette fois-ci, j'ai minutieusement étudié la carte et je me rends compte que Possotomè est exactement au même prix que les autres eaux minérales. À 1500 F comme les eaux minérales dans le restaurant de la dernière fois. Et surprise, ils proposent aussi du Perrier. À combien ? 2000 F ! Ce qui a beaucoup plus de sens. Même si ce restaurant est tenu par des Libanais (surprise !), ils ont compris qu'il est absurde de proposer une eau minérale qui vient de plus de 5000 km moins cher qu'une eau minérale qui vient d'une centaine de kilomètres à côté. Et de plus, en termes de gestion de menu, tu as tout intérêt à habituer ton consommateur à consommer un produit dont tu es à peu près sûr de pouvoir toujours te ravitailler que de consommer un produit dont le prix pourrait passer du simple au double suite à une hausse des cours du pétrole.

Mais bon, je pense que le restaurant de la dernière fois était exactement dans sa logique. Il appartient certes à un Togolais, mais il a été racheté il y a quelques années à un Français. Et le nouveau propriétaire n'a rien changé. Du nom, totalement français, à la carte qui joue clairement dans le camp de la France économiquement parlant. Il est vraiment temps que nous nous réveillions et nous rendions compte que nous sommes dans une guerre, qu'on le veuille ou pas.

En attendant, dans le restaurant d’aujourd’hui comme dans celui de la dernière fois, j'y suis allé pour manger des pizzas. Comme quoi la bataille est presque perdue de notre côté. Quand nous mangeons dehors en Afrique dorénavant, pour peu que nous voulions manger dans un coin chic, nous sommes quasiment obligés de manger un plat qui vient d'ailleurs. Et dire que certaines personnes ne comprennent toujours pas mon combat avec Katering.


Lomé 🇹🇬 

Pourquoi je refuse qu’on salisse l’image de mon pays

Chez nous, on dit souvent que si tu as un problème avec ta femme ou ton mari, ne va jamais parler en mal de la personne devant ta famille. La raison : si les choses s'arrangent entre vous, tu pourrais oublier tout ce que ton partenaire t'a fait, mais ce n'est pas sûr que ta famille, elle, oublie.

Comme d'habitude, ça fait partie des sagesses fortes de chez nous qu'on se répète de père en fils, de mère en fille depuis des siècles sans jamais l'écrire quelque part et dont malheureusement la nouvelle génération ne perçoit pas la profondeur. Cette nouvelle génération bercée aux sirènes des choses venues d'ailleurs, des choses qui brillent.

Cet enseignement, bien qu'illustré par les relations de couple, s'applique à beaucoup d'autres aspects de la vie. Des aspects que nous n'arrivons pas souvent à saisir. L'un de ces aspects fait partie de mon combat quotidien. Celui de protéger le nom de notre pays.

Quand je m'insurge contre toutes ces personnes, des compatriotes ou des étrangers comme Trump, qui traitent notre pays de pays de merde, certains pensent que je veux jouer au super Camerounais. Un autre m'a encore rappelé hier que moi et tous les gens comme moi, nous n'aimons pas ce pays plus que lui. Mais bon, on va garder ce sujet pour un autre jour.

Si je m'insurge contre tous ces noms d'oiseaux et toutes ces mauvaises étiquettes que nous voulons coller à notre pays, c'est parce que ces étiquettes seront extrêmement difficiles à défaire dans le temps. Aujourd'hui, le pays peut être dans un sale état, oui, mais nous ne devons pas pour autant lui donner une image qui risquera de lui coller à la peau même quand il deviendra le pays dont nous rêvons tous.

Nous savons à quel point les surnoms ont la peau dure, surtout les mauvais. Si on t'en a déjà collé un dans ta vie, tu sais de quoi je parle. Et quand il s'agit d'un pays, la viscosité est encore plus forte. Pendant des années, j'avais par exemple mis le Nigeria sur ma liste de pays à ne visiter pour rien au monde. La cause ? L'image qu'ils m'ont donnée de leur pays avec les films de sorcellerie. Et quand j'en parlais l'année passée à un groupe de personnes, deux avaient fait exactement la même chose que moi. Je suis certes allé au Nigeria il y a quatre ans pour le mariage de mon pote Stéphane, mais je ne te cacherai pas que cette image de pays fief de la sorcellerie n'est pas encore complètement sortie de ma tête, bien que je sache que le Nigeria est l'un des plus grands pays de notre beau continent.

Pour vendre leur pays, les USA ont utilisé Hollywood. Nous vendant une image idyllique de l'Amérique. Une image qui continue de faire rêver des millions de personnes à travers le monde malgré les fusillades, malgré les bavures policières sur les Noirs, malgré les coûts exorbitants de santé, malgré un président actuel ouvertement contre les étrangers. Comme quoi, une fois qu'une image est adossée à un pays, il devient très difficile de la défaire.

Donc, il n'est que normal que tu me trouves sur ton chemin chaque fois que tu voudras coller une mauvaise image à mon pays. Toi, tu iras certainement quémander une autre nationalité un de ces quatre. C'est d'ailleurs ce que la plupart des personnes qui nous chient dessus ont déjà fait. Mais moi, ce pays, il sera toujours le mien. Et celui de mes enfants, de mes petits-enfants et de tous les descendants à venir de la dynastie Kouakep.

Chacun n'a qu'à défendre son image !


Lomé 🇹🇬 

Pourquoi nous devons être des soldats économiques

Je saisis ce texte depuis un restaurant à Lomé. J’ai été choqué par un petit détail et je me suis dit que je pouvais le partager directement avec toi. Par contre, ne me demande pas ce que je fais dans un restaurant avec mon ordinateur. Moi-même, ça me dépasse.

Bref, je prends la carte du restaurant et commence mon inspection. Oui, oui, je suis aussi un entrepreneur culinaire, au cas où tu l’aurais oublié. Comme d’habitude, je cherche de l’eau. Je me rends compte que l’eau minérale coûte 1 500F, sans surprise. Le Perrier aussi, cette eau gazeuse importée de France.

Curieux, je demande au serveur s’ils ont Possotomé, une eau gazeuse béninoise que j’ai découverte plus tôt dans la journée. Il me répond que oui, et me la montre sur la carte… à 3 000F. Et c’est là que les problèmes ont commencé.

Je lui demande comment ils peuvent vendre une eau gazeuse importée de France à 1 500F et une eau gazeuse importée du Bénin à 3 000F. Il me répond que ce ne sont pas les mêmes quantités. En effet, le Perrier fait 33 cl, alors que la Possotomé fait 1,5 L. Sauf que… j’ai vu cette même Possotomé à 1 500F la bouteille plus tôt dans un autre restaurant de la ville aux standards quasi identiques. Donc elle ne doit pas coûter si cher à l’achat.

Là, tu dois te dire que je suis en train de chipoter pour une histoire de bouteille d’eau. Mais si c’est ce que tu penses, c’est que toi aussi, tu n’as pas encore compris.

La guerre économique se joue à tous les niveaux

Nous devons tous être des soldats dans cette bataille, car si nous perdons, nous serons asservis. Obligés de manger, parler et même chier comme les autres l’auront décidé.

En proposant du Perrier à 1 500F et la Possotomé à 3 000F, nous poussons inconsciemment les consommateurs à choisir une eau recueillie à des milliers de kilomètres au lieu d’une eau locale, puisée juste à côté.

Résultat ? On continue de renforcer l’importation de certains produits, même quand des alternatives locales existent déjà.

En tant qu’entrepreneur, nous sommes en première ligne dans cette guerre économique. Nous avons la responsabilité de faire des choix stratégiques qui favorisent nos produits, nos industries et nos économies.

Ce que j’aurais fait

Moi, je n’aurais même pas proposé du Perrier sachant qu’il existe Possotomé.

Si c’était une question de marge, j’aurais gardé le prix à 3 000F, mais j’aurais positionné l’eau béninoise de manière plus avantageuse :

    • Soit en mettant Possotomé au même prix que Perrier (1 500F) pour les inciter à l’essayer.
    • Soit en la mettant à 2 000F, histoire qu’elle reste compétitive par rapport au Perrier, tout en conservant une bonne marge.

Je suppose que le restaurant applique une marge fixe sur chaque boisson et arrondit aux 500 supérieurs pour des prix ronds. Mais peu importe la logique adoptée, nous ne devons jamais perdre de vue que nous faisons partie d’un écosystème. Un écosystème que nous avons intérêt à voir prospérer.


Lomé 🇹🇬