Écrire tous les jours, même sans idée

Il est 20 h passées. Je suis encore au bureau, alors que je suis en train de travailler à être à la maison au plus tard à 17h30 pour pouvoir passer les soirées avec mes enfants. Une routine que j’aimerais mettre en place avant qu’ils ne reviennent vivre avec moi. Mais bon, je n’ai pas encore écrit mon texte du jour, et ce serait pas mal si je pouvais le faire avant de rentrer. Le problème, c’est que je n’ai pas d’inspiration, et que si je dois me pencher sur l’un des 90 sujets présents dans ma base de données, j’en aurais au moins pour deux heures avant de finir. Et comme je te l’ai dit, il est déjà 20h10 passées.

J’ai repensé à cette personne qui m’a inspiré, il y a plusieurs années déjà, à me lancer dans cette aventure qui consiste à écrire un texte chaque jour. Une personne qui le fait chaque jour depuis au moins 20 ans : Seth Godin. Je suis allé sur son blog pour lire les derniers textes publiés. Et comme par miracle, le texte de ce jour, 1er avril 2025, était juste magnifique. Un texte que j’aurais pu écrire moi-même.

J’ai pensé à le traduire en français pour le partager avec toi, en donnant à Seth tout le crédit bien sûr. Mais ensuite, je me suis dit que je pouvais faire mieux. Que je pouvais peut-être te mettre en contact avec lui. Pas un contact direct, bien que nous ayons eu un échange par mail il y a quelques années, dans lequel je lui faisais une remarque sur son dernier livre et où il me répondait avec toute la bienveillance qui est la sienne. Non, pas ce genre de mise en contact. J’aimerais juste te passer le lien de son blog : seth.blog.

Si tu aimes ce que je fais, tu vas adorer ce qu’il fait lui. Tu te rappelles dans le texte d’hier, je te parlais de la répétition dans la quête d’excellence ? Imagine ce que plus de 20 ans à écrire tous les jours, et plus d’une vingtaine de livres publiés — dont plus d’une dizaine de best-sellers — peuvent faire à une plume. Tout ce dont tu auras besoin, ce seront tes skills d’anglais. J’espère qu’il pourra devenir pour toi aussi une source d’inspiration si réfléchir est quelque chose qui t’intéresse.


Douala 🇨🇲 

Tu veux faire du bon boulot ? Commence par en faire beaucoup

Ce matin, avec une de mes collaboratrices, nous avons eu une discussion sur l’importance de la fréquence des publications versus la qualité des publications. C’est notre responsable communication à Agrifrika, et elle me faisait savoir qu’elle préférait qu’on publie 2 à 3 fois par semaine sur nos pages, au lieu de tous les jours, et qu’on se concentre sur 2 à 3 publications intéressantes.

J’ai dû lui rappeler, à elle aussi, cette histoire racontée dans le livre Art & Fear, où un professeur de poterie avait divisé sa classe en deux groupes. Il a dit que la note du premier groupe serait proportionnelle à la beauté du vase qu’il présenterait à la fin du semestre. Et la note du deuxième serait proportionnelle au nombre de vases qu’ils auraient produits à la fin du semestre. Plus ils en feraient, plus grande serait leur note. Et bizarrement, le groupe qui avait produit les plus beaux vases — et de très loin — était le groupe qui avait la consigne de produire le plus de vases possibles.

Comme ma collaboratrice ce matin, on se prend souvent la tête à vouloir produire un travail parfait. Et la plupart du temps, on n’y arrive pas. Alors que la solution la plus simple serait de produire le plus de travaux possibles. Il n’existe presque rien sur cette Terre qui ne puisse s’améliorer avec la répétition. Et c’est le conseil que je donne à la plupart des gens : “si tu veux devenir meilleur que tu ne l’es dans quoi que ce soit, augmente le nombre de répétitions.” C’est cette expertise que possèdent les personnes qui ont de longues années d’expérience dans leurs domaines. C’est cette répétition qui permet à un Stephen Curry de faire des shoots incroyables. Ce n’est pas un talent ou une force surnaturelle. Juste un nombre impressionnant de répétitions.

Ça fait aujourd’hui plus de dix mois que j’écris tous les jours au moins un texte. Certains de mes textes sont des chefs-d’œuvre. Tellement bien écrits que moi-même, il m’arrive de les relire et de me demander ce que j’avais mangé ce jour-là. D’autres, comme celui-ci, sont juste "ok". Et certains, j’ai même honte de les publier. Mais s’il y a une chose que j’ai apprise avec le temps, c’est que c’est parce que j’écris tous les jours que je peux, de temps en temps, produire des chefs-d’œuvre. Si je devais m’asseoir et produire un texte dont je serais fier, je pense que j’aurais abandonné depuis longtemps.

J’espère que cette leçon, mon pote Raoul l’a enfin comprise. Le plus important, ce n’est pas d’écrire ton meilleur texte chaque fois que tu t’assois. Mais de pouvoir écrire le plus souvent, afin que tes meilleurs textes sortent un peu plus régulièrement. Et pourtant, il a naturellement une belle plume.


Douala 🇨🇲 

Un tête-à-tête avec Maurice Kamto : ma perception a changé

Aujourd’hui, j’étais à une rencontre entre le Pr Maurice Kamto et les entrepreneurs de la tech. C’était la première fois que je participais à une rencontre avec un candidat à une élection présidentielle, et la première fois que j’avais un échange direct de quelques minutes avec le professeur.

Et tu me connais, je n’ai pas manqué de lui dire qu’il parlait beaucoup trop de la diaspora à mon goût. Que sur un pays de 30 millions d’habitants comme le Cameroun, le temps de discours accordé à la diaspora n’était pas proportionnel au nombre de personnes que cette diaspora représente par rapport à la population du pays. Bref, comme il me l’a si bien dit : La politique est une affaire de perception.” Et bien qu’ils n’aient pas l’impression que leur programme soit axé vers la diaspora, si c’est l’impression que nous avons, ils s’engagent à corriger le tir et à faire mieux.

Franchement, j’ai trouvé qu’il avait de la classe de répondre de la sorte. C’est très loin de la réponse qu’il a donnée chez Valérie Ndongo quand on lui a posé des questions sur les agissements agressifs de certains de ses supporters. Je pense qu’à ce moment-là, il aurait pu tout simplement s’excuser de ne pas avoir été plus ferme avec eux et s’engager à faire mieux prochainement. Car comme il me l’a si bien dit ce soir, la politique, c’est une question de perception. Le tout n’est pas d’être dans son bon droit ou d’avoir raison, mais d’être bien perçu par les personnes que l’on souhaite convaincre.

Et bien que je n’aie pas forcément été convaincu par son intervention aujourd’hui, qui a duré plus de trois heures, ma perception de l’homme a totalement changé. Et comme me disait Lionel dans la longue discussion que nous avons eue après coup, nous ne devrions peut-être pas nous arrêter sur les quelques détails qui nous gênent chez ces hommes politiques qui veulent incarner un renouveau. Peut-être que la seule chose sur laquelle nous devrions nous concentrer maintenant, c’est ce renouveau. Car autant de décennies à respirer le même air, à un moment donné, même le cerveau ne peut plus suivre.

Vivement que tous les acteurs engagés pour cette élection présidentielle puissent se mettre d’accord sur ce renouveau et éviter de disperser les votes comme ils l’ont souvent fait.

PS : N’est-ce pas si j’avais déjà un assistant, il aurait pris une photo de mon tête-à-tête avec le professeur ? Ou bien j’attends quoi pour être riche, oh ?


Douala 🇨🇲 

Notre intelligence collective vaut plus que nos talents individuels

Hier, j’ai publié un texte en hommage à mon cousin Georges, qui fait partie de mes valeurs sûres depuis quelques années. Une des rares personnes sur qui je sais que je peux encore compter depuis que j’ai décidé de go all-in dans ce combat que je mène pour mon peuple.

À la fin de mon texte, je mentionnais le fait qu’un informaticien aussi talentueux et intelligent que lui devrait avoir son propre nom de domaine. Aujourd’hui, il l’a acheté. Donc il va falloir que je fasse un autre texte bientôt pour t’envoyer sur le nouveau domaine. Mais bon, ce n’est pas le sujet du jour.

Je mentionne cette histoire qui semble anodine parce qu’elle est au cœur de ce que je fais tous les jours. Georges est un informaticien avec beaucoup d’expérience. Acheter des domaines, mettre en place des services IT, il l’a fait de nombreuses fois pour des clients prestigieux, parmi lesquels Interpol (un peu d’atalaku, c’est maintenant qu’il faut travailler l’argent des fêtes avec les mbenguistes). Il gagne très bien sa vie et est extrêmement généreux. Donc ce n’était ni une difficulté technique, ni un problème d’argent. C’était certainement quelque chose qui ne lui était pas passé par la tête ou bien auquel il ne prêtait pas une grande importance. Il a suffi d’un rappel de ma part pour qu’il mette tout en ordre. Et je pense qu’il l’aurait fait si le rappel était venu de n’importe qui d’un peu sérieux.

Des situations comme celles-ci, c’est l’histoire de ma vie. Depuis tout petit, je suis quelqu’un de très curieux. Je dirais même d’extrêmement curieux. La plupart des choses que je fais ou que je connais dans ma vie sont le fruit de ma grande curiosité. Et avec le temps, je me suis rendu compte que je connaissais pas mal de choses. Je me suis rendu compte que j’avais développé une faculté à voir les choses sous des angles totalement différents de la plupart des gens. Il ne se passe pas une semaine sans que je ne dise ou fasse une chose qui, pour moi, est tellement évidente, sans que ça ne surprenne totalement au moins une personne.

Au fur et à mesure que je prenais conscience de cette faculté spéciale qui était la mienne, j’ai compris la responsabilité qui allait avec. Comme disait Stan Lee (par l’intermédiaire de l’oncle Ben de Spiderman), “avec de grands pouvoirs viennent de grandes responsabilités”. J’ai compris que ma responsabilité était de faire entendre ma voix, de partager ce que je savais, même si je n’étais pas sûr de son importance. On ne sait jamais quelle importance cette information aura pour quelqu’un ici dehors. Et depuis que j’ai embrassé cette responsabilité, je peux t’assurer que je vois tous les jours l’importance du peu de choses que je sais et des perspectives souvent incomprises que je peux avoir de la vie.

Des fois, ma façon de le dire peut sembler dure et choquante. Mais je pense que nous sommes d’accord que si ça ne l’était pas, tu ne prêterais sûrement pas attention. Nos cerveaux sont juste faits comme ça.

Cependant, je ne suis pas spécial. Nous tous, chacun à sa manière, connaissons quelque chose que les autres ne connaissent pas. Quelque chose qui lui est tellement évident pour nous et dont notre entourage est juste totalement ignorant. Le problème, c’est que nous ne sommes pas assez nombreux à partager ce que nous savons. Nous ne sommes pas nombreux à oser nous lever, prendre le micro et parler. Nous ne sommes pas nombreux à vouloir mettre nos idées, aussi farfelues qu’elles puissent paraître, dehors. Nous ne sommes pas nombreux à participer à l’intelligence collective. Ce qui continue de faire de nous un peuple pas très intelligent malgré la brillance de certains de ses individus.

J’ai souvent l’habitude de dire que l’informatique est un outil qui est né devant la nécessité de gérer des ressources de plus en plus complexes. Et ce n’est pas un hasard si depuis sa création, les tableurs sont la star indétrônée du secteur. Même l’IA qui fait la pluie et le beau temps aujourd’hui est juste une version améliorée de la gestion de ressources, en l’occurrence des données. Chaque fois que les êtres humains améliorent la communication entre eux, le transfert rapide et fiable de données, ils font un bond en avant en terme d’évolution. Et ça, c’est valable à l’échelle humaine, d’un pays comme à celle d’une communauté.

Nous n’avons pas un manque de connaissances ou d’aptitudes. Nous n’avons juste pas une circulation efficace de ces connaissances et aptitudes dans notre communauté. Depuis l’année passée, sous mon impulsion, des dizaines de personnes se sont mises à écrire publiquement. Et pourtant, j’écris depuis des années déjà. Juste que c’est l’année passée que j’ai décidé de le mettre dans le domaine public. Et des changements d’habitudes comme celui-ci, j’en ai déclenché des centaines tout au long de ma vie. Pas parce que ces personnes étaient moins intelligentes que moi, non. Parce qu’elles étaient concentrées à faire autre chose et ne voyaient pas forcément la pertinence de ces habitudes. Moi-même, je suis le fruit de connaissances que j’ai piochées dans l’arène. Et il en est de même pour nous tous. Cependant, notre intelligence collective ne sera aussi grande que la quantité de connaissances que chacun de nous remettra dans la communauté. Et nul besoin de contribuer avec quelque chose d’exceptionnel. Il suffit juste de contribuer. Ce qui est banal pour toi et évident pour 99 % des membres de la communauté peut être exceptionnel pour le 1 % restant. Et qui sait quelle sera sa contribution après qu’il soit rentré en possession de cette connaissance qui te paraît tellement banale.

J’aimerais le dire d’une meilleure manière. J’y reviendrai certainement plus tard avec un texte plus articulé. Mais en attendant, je t’invite à contribuer autant que tu peux à notre intelligence collective. C’est elle qui déterminera notre destin, et non nos efforts personnels. Et je ne parle pas ici de challenges tiktok hein. On se connaît!


Douala 🇨🇲

Le Georges que tu devrais lire chaque jour

On parle comme ça, c’est la procrastination qui va tuer quelqu’un dans ce monde-ci. Ça fait aujourd’hui plusieurs mois que je dois faire ce texte, mais je passe mon temps à remettre à demain. À me dire que je n’ai pas encore les bons mots. À causer une injustice à l’une des rares personnes à qui je ne devrais pas le faire. Mais bon, apparemment, c’est notre spécialité en tant qu’humains. J’espère juste qu’il pourra trouver la force de me pardonner pour tout le retard que j’ai pris.

Je voulais lui réserver un meilleur texte, mais je pense que le plus important, ce n’est pas la qualité du cadeau, mais l’intention derrière le cadeau. Une leçon qui m’a pris 10 ans et un mariage pour apprendre. Et faut croire que je ne la maîtrise toujours pas.

Aujourd’hui, je voudrais te parler d’une des personnes dont je suis le plus fier depuis ces dernières années. L’une des personnes dont la transformation m’impressionne jour après jour. L’un de mes mbenguistes préférés, pendant qu’il l’est encore. Il s’agit de mon cousin Georges Defo.

Georges s’est mis lui aussi à écrire il y a quelques mois. Et depuis lors, il n’a jamais manqué un jour. Contre vents et marées, il tient la barre. Publiant un texte par jour. Un texte où, la plupart du temps, il partage une partie de sa grande intelligence, parfois une partie de sa vaste expérience professionnelle, et parfois juste une partie du grand humain qu’il est. Une de ces rares personnes qui n’a pas peur de se poser des questions. Les questions les plus difficiles, et d’aller chercher les réponses même dans les endroits qui nous font souvent le plus peur.

Il ne le savait pas (jusqu’à présent), mais il fait partie de mes rituels. L’une des personnes que je fais un point d’honneur à rencontrer quand je suis de passage en Occident, pour essayer de continuer à avoir la foi que nous pourrons un jour récupérer une partie de nos enfants arrachés sournoisement à nos terres par l’ennemi. Chaque rencontre, ce sont de longues heures de discussion où j’apprends comment il continue, un peu plus chaque fois, à orienter sa vie vers une mission plus grande. De longues heures de discussion où il contribue, sans le savoir, à me donner la force de continuer le combat.

Des personnes comme lui, je nous souhaite d’en avoir un peu plus dans le monde. Des personnes comme lui, je te souhaite d’en avoir un peu plus dans ta vie. Des personnes comme Georges, je te souhaite de les lire tous les jours. Et qui sait, peut-être que toi aussi tu seras le Georges pour des personnes comme moi dans ta vie.

En attendant, je t’invite à aller le lire sur son blog. Et si tu as l’occasion de lui laisser un commentaire, dis-lui qu’un informaticien de son calibre ne devrait pas héberger son blog gratuitement sans même avoir sécurisé son nom de domaine. Mais ne lui dis surtout pas que ça vient de moi. J’ai déjà beaucoup trop de problèmes avec les mbenguistes comme ça.


Douala 🇨🇲 

Le pain du deuil… et ce que nous avons oublié

La semaine passée, avec d’anciens camarades de classe, nous étions à la veillée du papa de l’un d’entre nous. Comme c’est l’habitude dans notre groupe, nous avons cotisé un peu d’argent, et ceux d’entre nous qui étaient disponibles se sont déplacés pour la veillée, avant que le corps n’aille au village pour l’enterrement.

Sur place, notre ami endeuillé, après nous avoir fait faire le tour de la dépouille et salué sa maman, la veuve éprouvée, nous a installés quelque part. Il nous a fait servir à boire pendant qu’il continuait à recevoir d’autres invités. Par contre, nous n’avons pas eu droit au pain du deuil. Et je ne sais pas pourquoi, mais dans mon cœur, je me suis dit qu’il ne nous avait pas bien reçus.

Je te vois déjà venir. Tu vas dire que la nourriture a fait ci, fait ça. Mais bon, on se connaît. Moi, je dis tout haut ce que la plupart d’entre nous pensent tout bas. Car à la fin de la journée, nous sommes tous animés plus ou moins par les mêmes pensées. Certains sont juste plus hypocrites que d’autres.

Après que cette idée m’est venue à l’esprit, je me suis demandé d’où elle pouvait bien venir. Et après réflexion, je me suis dit qu’elle devait venir de mon éducation. Cette façon particulière que nous avons eue de gérer les deuils depuis des années. Cette habitude que nous avons prise de transformer les deuils en occasions de fête et, souvent, de débauche. Certainement de ces histoires attendues pendant des années, des réunions qui venaient faire du boucan dans les deuils parce qu’elles estimaient qu’on ne les avait pas bien reçues. Certainement à cause de cette habitude innocente, mais pas sans conséquence, que nous avons développée de donner de l’argent aux personnes endeuillées. Pas pour améliorer la vie après le départ de l’être cher, mais pour pouvoir recevoir toutes les personnes qui viendraient l’aider à pleurer à base de bières et de nourriture.

Et je me suis dit que c’est certainement parce qu’inconsciemment, j’essaie de m’éloigner de tout ça, que jusqu’à présent je n’ai dit qu’à très peu de personnes que j’avais perdu mon grand frère il y a trois semaines. C’est peut-être pour cette raison que ce deuil, je n’arrive pas à le faire en public. Et qu’il n’y a que dans des moments comme celui où j’écris ces lignes, seul dans ma chambre, que je verse une fois de plus des chaudes larmes pour sa perte.

Repose en paix Tonton Guy !

J’aurais aimé te dire tous les projets que j’ai pour notre famille, nos mamans et nos enfants, mais hélas tu es parti sans crier gare. Me laissant avec l’obligation de rester fort et de continuer ce combat, que tu sois enterré avec une bière et le pain du deuil ou pas.


Douala 🇨🇲 

Voyager en Afrique, ça ne compte pas ?

Le mois passé, j’ai fait quelques voyages en Europe et en Afrique. Après une longue période sans rien publier sur mes statuts WhatsApp, je me suis remis à partager quelques photos de mes déplacements. D’abord en France et en Allemagne, puis au Togo, au Bénin et au Ghana.

Quand j’ai commencé à publier des photos en Europe, certains contacts m’ont écrit pour me faire savoir que je me positionnais contre l’immigration mais que j’étais bien content de voyager en Occident. Et bizarrement, sur mes publications en Afrique, aucune remarque. Et je me suis rappelé que je n’avais eu aucune réaction non plus en décembre dernier, lorsque je publiais des photos de mon voyage avec maman entre le Kenya et le Rwanda.

Du coup, je n’arrête pas de me demander depuis lors si nous n’avons vraiment aucune dignité. C’est à croire que, même pour nous Africains, voyager en Afrique n’a aucune importance, et que seul le voyage en Occident définit notre statut et justifie notre existence. On dirait bien que la mentalité d’esclave a réussi à s’infiltrer dans notre ADN. Tu m’étonnes qu’autant d’entre nous, ou de nos enfants, soyons prêts à risquer nos vies pour pouvoir obtenir une place en Occident. Même s’il s’agit d’y jouer le rôle de papier toilette.


Douala 🇨🇲 

Sommes-nous condamnés à être les bouffons du monde ?

Je ne sais pas pour toi, mais il y a quelque chose qui me gêne un peu depuis quelques années. Je ne passe pas beaucoup de temps sur les réseaux sociaux. Mais quand je vais sur des plateformes comme TikTok ou Facebook, j’ai l’impression que tous les Noirs sont devenus des humoristes ou des danseurs.

Il suffit de quelques minutes sur ces plateformes pour faire ce constat accablant. Nous passons notre temps à aller de challenge en challenge. Tout le monde s’y met, des plus petits aux plus grands, en passant même par des stars qui ont réussi dans d’autres domaines et qui, selon moi, devraient utiliser leur influence pour emmener leur public à s’intéresser à des choses un peu plus sérieuses.

Tu me diras que c’est ce que l’algorithme réclame et récompense. Qu’il est beaucoup plus facile d’avoir de la visibilité en dansant ou en faisant le bouffon. C’est vrai. Mais sommes-nous obligés de suivre la dictature des algorithmes ? S’il récompense les contenus d’inceste demain, nous allons aussi suivre bêtement ?

Nous sommes le peuple le plus à la ramasse de la planète. Nous sommes tellement en retard de développement par rapport aux autres que c’est à se demander si nous ne sommes pas vraiment des sous-hommes. Au lieu d’essayer de se concentrer pour travailler à rattraper notre retard, de canaliser l’énergie de notre jeune population vers des entreprises productives et à impact à long terme, nous avons décidé de devenir les bouffons du monde. On secoue les reins, on répète des chorégraphies à la perfection sur des plateformes développées par nos égaux ailleurs.

Et c’est dans ces bêtises qu’on peut bien constater qu’un Noir reste un Noir, quelle que soit la couleur de son passeport. Car même cette diaspora qui se targue d’être plus instruite et plus civilisée est en première ligne quand il s’agit de faire les bouffons pour le bon plaisir des autres sur des plateformes qu’eux-mêmes n’ont pas pu développer, malgré toutes ces années passées au pays des bosseurs.


Douala 🇨🇲 

Et si toi aussi tu me faisais un courrier ?

La semaine dernière, je suis allé relever mon courrier et, dans ma boîte postale, j’y ai trouvé le premier droit de réponse depuis que je fais ce blog. Un courrier avec accusé de réception envoyé depuis la France par Mlle Michelle Claude. Un courrier de quatre pages. Je reviendrai plus tard sur son contenu après m’être entretenu avec elle.

L’émotion à la réception de ce courrier était juste indescriptible. Pas seulement parce que, pour une fois, une personne (noire) a pris de son temps, s’est assise et a posé ses idées sur papier pour défendre son point de vue. Mais aussi pour le travail qui s’en est suivi : de la saisie de texte à l’impression, l’achat de l’enveloppe, le trajet pour la poste et les 11 € dépensés en timbre pour faire parvenir ce courrier jusqu’au Cameroun en recommandé avec accusé de réception.

L’émotion était tellement grande que je me demande combien d’entre vous seraient capables de me la faire revivre si je le demandais. Du coup, aujourd’hui, je te demande, à toi qui lis ce texte, quelle que soit la partie du monde dans laquelle tu te trouves actuellement, de me faire un courrier pour me dire quelles sont les émotions que mes textes te font ressentir.

Tu n’es pas obligé de faire quatre pages comme Michelle Claude. Tu n’es même pas obligé de faire une lettre ou de l’envoyer en recommandé. Ça peut juste être une carte postale dans une enveloppe, avec quelques mots sur ce que tu penses de mon travail avec ce blog.

J’espère qu’on pourra se prouver que nous pouvons nous aussi être dans l’action. Cette action-ci ne sera pas la plus difficile que tu auras à faire dans la semaine, mais elle pourrait être la plus importante. Et en plus, en fonction de vos lieux d’envoi, je pourrai faire un tableau des délais de livraison de courriers vers le Cameroun selon les pays.

Je compte sur toi !

Ronel Kouakep
BP: 457 Douala
Cameroun


Douala 🇨🇲

Rentrer en Afrique, c’est refuser de travailler ?

On parle comme ça, le Noir c’est quelque chose hein. Souvent, je me demande même si nous ne sommes pas vraiment une sous-race comme le proclament les suprémacistes blancs. Un peu comme dans cette interview où on demande à Elon Musk s’il pense vraiment que les Noirs et autres minorités ne sont pas des peuples intelligents et il répond : "Ce n’est pas ce que j’ai dit. Je dis juste que nous ne devrions pas baisser les standards pour eux." En gros, on ne va pas descendre le panier de basket de 3m05 à 1m50 parce que vous êtes des pygmées.

Pourquoi je t’en parle aujourd’hui ? Parce que cet après-midi, maman m’a encore sorti une nouvelle bombe. Une de ses sœurs lui aurait dit que, parce que j’ai décidé de rentrer me battre au pays, je refuse de travailler. Donc, d’après elle, si tu as la possibilité de travailler en Europe et que tu décides de le faire en Afrique, tu refuses de travailler. Ou bien, c’est peut-être parce que j’ai décidé d’être un entrepreneur et que depuis des années, j’essaie tant bien que mal de faire décoller plusieurs projets.

Je ne comprends pas comment nous en sommes arrivés à nous rabaisser de la sorte nous-mêmes. Nous en sommes arrivés au point où nous sommes persuadés que même le travail, c’est en Occident. Juste parce qu’on y gagne un peu plus d’argent. Alors même que la plupart de nos diplômés là-bas ne font que remplir des fichiers Excel et manipuler d’autres logiciels en longueur de journée. Le vrai travail, celui du terrain que nous devons faire ici en Afrique si nous voulons avoir la chance de nous développer un jour, nous ne le considérons pas.

Mais ce qui me choque le plus, c’est que la personne qui dit ça travaillait au Cameroun (le pays où il n’y a pas de travail) pour payer les études de ses enfants en Occident, pendant que moi, je faisais toutes sortes de petits boulots en Occident pour payer les miennes.

Mon choix de revenir mettre mon expertise au service de mon pays ne me donne pas encore autant d’argent que tous les marchés publics qu’ils ont gagnés ici pour envoyer leurs enfants à l’étranger. Mais cela n’en demeure pas moins du travail. Que ça leur plaise ou non.

Quand je pense à tous ces jeunes à qui des parents idiots comme ça détruisent les rêves, je me dis juste que nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge. Si nous n’avions que des parents de la sorte, l’Afrique n’aurait certainement jamais des personnes comme mon ami Victor Likone, qui s’est battu pendant une décennie avec un projet qui commence à peine à porter ses fruits.

Mais bon, que peut-on attendre des parents du troisième âge qui partent quémander des titres de séjour en Occident comme des mendiants ?


Douala 🇨🇲