Ces personnes qui changent ta vie sans que tu t’en rendes compte

Quand était la dernière fois que tu t’es arrêté pour te demander qui sont les personnes qui t’apportent le plus dans ta vie ? Je ne parle pas des personnes qui partagent ta vie et que tu vas probablement citer machinalement sans vraiment réfléchir. Je parle des personnes qui, de près ou de loin, ont apporté un gros plus dans ta vie et/ou qui continuent de le faire. Que ce soit par leurs conseils, un livre, une vidéo, ou tout simplement par leur exemple.

Nous avons tous des personnes comme ça dans nos vies. Mais nous sommes souvent tellement concentrés à nous plaindre de ce que nous n’avons pas que nous oublions de réaliser la chance que nous avons de les avoir, de près ou de loin.

J’aimerais t’inviter à faire cet exercice et à identifier ces personnes dans ta vie. Ensuite, fais quelque chose pour exprimer ta reconnaissance. Qu’ils soient vivants ou non, qu’ils puissent le savoir ou non, l'important est simplement d’envoyer ta gratitude. Cela permettra à ce type de personnes de continuer à exister dans le monde, pour toi, et pour nous tous.


Douala 🇨🇲 

L’Afrique face à ses défis : Où sont nos Nobel ?

Cette année, le prix Nobel d’économie a été décerné aux économistes Daron Acemoglu (MIT), Simon Johnson (MIT) et James A. Robinson (Université de Chicago) pour leurs travaux sur la manière dont les institutions se forment et influencent la prospérité. En termes simples, ils ont étudié le rôle des institutions dans le développement d’une communauté.


Il y a une dizaine d’années, Daron Acemoglu et James Robinson ont écrit un brillant livre sur le sujet, Prospérité, puissance et pauvreté : Pourquoi certains pays réussissent mieux que d’autres (Why Nations Fail, en anglais). Un livre que je t’invite à lire si, toi aussi, tu es préoccupé par le développement de ta communauté.

Je consulte souvent la liste des prix Nobel et je suis toujours frappé par la sous-représentation des Africains. Et quand nous y figurons, c’est pour la littérature ou "la paix". Mais sur les sujets techniques, c’est le vide total. Je me demande : tous ces Africains dont on vante souvent la brillance à travers le monde, brillent-ils seulement dans leurs familles ? Ou bien c’est parce qu’ils ont réussi à construire un immeuble au pays?

Aujourd’hui, l’Afrique est sans doute le continent qui connaît le plus grand nombre de défis. Si nous travaillions sérieusement sur ces questions, nous devrions logiquement avoir des tonnes de prix Nobel, au moins en économie. Mais bon, apparemment, travailler pour Google, Amazon ou Facebook rapporte plus. Et pourquoi se donner autant de mal quand on a déjà son passeport canadien en poche ?

Donc, la prochaine fois que je traiterai cette diaspora de fainéante et inutile, j’espère que tu ne me diras pas que j’exagère. En attendant, je continue de travailler sur ce qui sera peut-être un jour aussi mon prix Nobel d’économie.


Douala 🇨🇲 

Sommes-nous encore envoûtés ? Une réflexion sur nos croyances et nos contradictions.

Je suis tombé sur une vidéo sur LinkedIn tout à l’heure. Franchement, il faut peut-être que je supprime mes comptes sur les réseaux, parce que je n’en peux plus avec mes frères africains.

Il s’agissait d’un pasteur qui parlait du fait que nous soyons envoûtés, envoûtés par les sages. Des sages qui comprennent parfaitement comment fonctionne l’être humain et qui utilisent ces connaissances pour envoûter des peuples entiers. À travers la psychologie ou encore des outils technologiques comme les notifications et TikTok. Bref, il disait des choses très pertinentes, avec des exemples tirés de la Bible où, pour continuer à asservir le peuple israélien, les pharaons faisaient appel à des sages pour perpétuer leur envoûtement. Il a même parlé du général Gallieni et de ses théories pour faire avancer l’agenda de la colonisation française en Afrique.

Dans la vidéo, il aborde le fait que les Africains veulent tous partir en Occident parce qu’on leur a fait croire qu’ils ne pouvaient rien faire par eux-mêmes, que le Blanc est la solution à tous leurs problèmes. Il évoque aussi un sujet dont je parle souvent avec mes amis de la diaspora : en Occident, des systèmes sont mis en place pour empêcher certaines personnes d’atteindre un niveau de connaissance qui leur permettrait de sortir du bas de la société. Le sort qui attend la plupart des enfants de toutes ces personnes qui fuient l’Afrique en croyant aller au paradis. Bref, le sujet était pertinent !

Au début, je ne savais pas qui parlait. Je me suis même dit à un moment donné qu’il restait encore quelques penseurs sur le continent qui n’avaient pas peur de dire la vérité, que tout n’était pas perdu. Ça, c’était avant la fin des trois minutes de la vidéo, quand il s’est levé pour prier avec son auditoire. Là, je me suis dit : "Ekiee, c’est quel genre de contradiction ça ?" Tu parles de l’envoûtement de certains peuples par des sages, alors que toi-même, tu es envoûté par une religion qu’on a imposée de force à tes ancêtres !

Non, je nous respecte ! Comment se fait-il qu’il n’arrive pas à faire le lien entre son message et sa position de pasteur ? Peut-être que tout est vraiment perdu pour ce continent.

Tout cela m’a rappelé une très belle discussion que j’ai eue avec ma mère ce week-end. Une discussion sur les grands philosophes de la Terre qui sont nés presque au même moment (Confucius, Zoroastre, Lao Tseu, Bouddha), sur l’origine des sociétés secrètes occidentales depuis Pythagore, sur la vie de Jésus et la secte (christianisme) créée après sa mort par ses disciples, sur le destin heureux du christianisme parmi les centaines de sectes que comptait l’Empire romain, qui a pris un coup de fouet avec Constantin Ier, dont la mère était chrétienne ; sur Constantinople (ancienne capitale de l’Empire romain sous Constantin) devenue Istanbul ; sur le fait que le Vatican serait peut-être en Turquie aujourd’hui si l’Empire ottoman n’avait pas existé ; sur le fait que les hommes ont compris à un moment donné que le meilleur ciment d’une nation, surtout quand les frontières s’élargissent, est d’unir les peuples sous une même croyance ; sur la naissance de l’Islam et la conquête du reste du monde ; sur la fin de l’expansion musulmane au nord du Cameroun, sur le fait que la conquête serait allée jusqu’en Afrique du Sud s’il n’y avait pas eu quelques couacs ; sur le fait que les peuples les plus développés se sont tous appuyés sur la philosophie d’un de leurs compatriotes ; sur le combat de Mao en Chine pour ramener le pays dans le confucianisme ; sur le fait que nous aussi en Afrique avons eu nos grands philosophes, mais avons eu la malchance de rencontrer l’écriture très tard dans notre histoire ; sur le fait que la première forme de transmission dans le monde, et la plus fiable, a toujours été la transmission orale ; sur le fait que les messages ont toujours été transmis par des chansons depuis des millénaires ; sur le fait que les sociétés se sont toujours organisées en confréries pour transmettre les messages importants aux initiés, formés pendant longtemps pour perpétuer la tradition ; sur le fait qu’en Afrique, ces griots, ces gardiens de la culture, ont été les premiers à être combattus pour nous couper de notre histoire ; sur le fait que si nous ne revenons pas à nos racines, nous ne pourrons jamais nous développer ; sur le fait que la plupart des peuples du monde ont leurs propres calendriers, qui reflètent l’observation du monde depuis leur environnement, et que nous sommes les seuls à vouloir vivre avec le calendrier des autres peuples ; sur le fait que ce n’est pas un hasard si le calendrier Bamiléké a 8 jours ; sur le fait que c’est à ma génération (et à toi qui me lis) de faire le travail d’anthropologie pour retrouver nos racines ; sur le fait que ce n’est pas impossible, car même si aucun de nous n’était là à l’époque du Jurassique, nous savons aujourd’hui beaucoup de choses sur les dinosaures. 

Bref, la discussion était tellement intéressante. J’ai vu dans les yeux de ma mère qu’elle-même ne savait pas quel genre d’enfant elle avait accouché. C’était juste dommage que cela n’ait pas été enregistré.

Oui, comme disait le pasteur, nous sommes envoûtés. Mais cela va plus loin, beaucoup plus loin qu’il ne l’imagine. Même la religion dont il est pasteur aujourd’hui est un instrument de notre envoûtement. Comme je disais à maman ce week-end : "La croyance est un mur qui nous sépare de la connaissance." Tant que tu crois, tu ne pourras pas réfléchir. Car réfléchir, c’est refuser de croire sans comprendre.


Douala 🇨🇲 

La fièvre de la loterie américaine à Douala : drapeaux, rêves et illusions

Ces derniers temps, à Douala, on se croirait au Texas. Je ne sais même pas s’il y a une ville américaine à l’heure actuelle qui affiche autant de drapeaux américains que Douala.

C’est la saison de la loterie américaine. Et tous les petits business disposant d’un ordinateur et d’une connexion internet se sont transformés en nouveaux comptoirs esclavagistes, arborant fièrement les couleurs de l’Oncle Sam. Le rituel dominical de nombreuses familles consiste actuellement à se rendre ensemble dans l’un de ces comptoirs improvisés pour s’enregistrer, dans l’espoir de faire partie des 55.000 personnes qui seront sélectionnées "au hasard" à travers le monde.

Pour seulement 1.000 FCFA, tu peux caresser le rêve de faire partie des heureux élus. Tu pourras aller aux USA et essayer, comme les noirs qui y sont depuis plus de 400 ans, de ne pas juste faire partie du décor.

Nos entrepreneurs du dimanche s’en donnent à cœur joie. La plupart ont redécoré leurs échoppes aux couleurs du "Stars and Stripes" pour l’occasion. Sans scrupules, comme le business douteux dans lequel ils se lancent ce mois-ci, beaucoup ont agrandi leur espace sur la voie publique afin d’accueillir un maximum de badauds. J’en ai même vu un qui affichait fièrement sur son mur ses statistiques de réussite des années précédentes : 13 vainqueurs telle année, 6 telle autre, 24 l’année dernière, et un objectif de 30 pour cette année. Comme s’il avait la moindre influence sur les résultats. Mais bon, va-t-on lui en vouloir ? Dans un marché de dupes, tous les coups sont permis.

L’année dernière, cette situation me mettait dans tous mes états, au point que j’avais envie de déchirer tous ces drapeaux qui flottaient dans la ville. Cette année, j’ai pris en maturité. Cette situation me sort toujours par les oreilles, mais j’ai compris que j’y ai aussi une grande part de responsabilité. Comment je m’en suis rendu compte ? Lorsque mon fils Zowa, qui malheureusement vit toujours en France avec sa mère, m’a dit le mois dernier : “Papa, je n’ai pas de drapeau du Cameroun. Tu pourras m’en amener un quand tu viendras, s'il te plaît ?” Là, j’ai compris que ces idiots occupent juste la place que nous leur avons laissée.


Douala 🇨🇲 (Le Continent) 

Vivere est militare

“Vivere est militare”, en français, “Vivre c’est combattre”, est une superbe phrase que nous devons à Sénèque. Une phrase qui résume parfaitement l’essence même de la vie : un combat perpétuel, une lutte constante pour surmonter les défis et challenges qui se présentent à nous chaque jour.

Si tu as l’impression que le monde te tombe sur la tête, c’est normal, c’est la preuve que tu es encore en vie. Continue de te battre et rappelle-toi qu’il vaut mieux ce combat que pas de combat du tout (la mort).


Douala 🇨🇲 

Elon Musk construit le futur pendant que la diaspora africaine parle immobilier

Hier soir, Elon Musk est arrivé à la présentation de Tesla dans une voiture totalement autonome. Sans volant, ni pédale. Il a enfin dévoilé leur Cybercab. Une sorte de taxi robot, un robotaxi pour les puristes. D’ici 2027, s’il tient ses promesses cette fois-ci, ces voitures seront légion dans les rues de Californie. Elles seront également disponibles à l’achat. Par exemple, au lieu de traverser toute la ville pour aller déposer tes enfants à l’école avant d’aller au bureau de l’autre côté de la ville, tu aurais ton propre cybercab qui se chargerait de déposer et récupérer tes enfants. Et imagine, tu rentres de soirée dans une zone sans taxi et au lieu de conduire, ton cybercab t’accompagne sagement jusqu’à chez toi pendant que tu dors dans la voiture. Bref, je te laisse imaginer toutes les possibilités.

Pendant cette présentation, il a aussi parlé du Robovan, une version du Cybercab qui peut contenir jusqu’à 20 personnes, et de ses humanoïdes Optimus qui sont de plus en plus performants et qui, selon ses estimations, pourraient coûter seulement 20.000 $. Pour 20.000 $, tu aurais un robot qui pourrait tout faire chez toi. Je ne sais pas si tu te rends compte : un robot qui pourrait faire le ménage, la cuisine, être le répétiteur de tes enfants, être un ami avec qui discuter. Bref, je te laisse imaginer les possibilités.

Entre-temps, le week-end passé, la diaspora dorée d’Afrique s’est retrouvée à Paris pour parler une fois de plus de leur hypothétique retour sur le continent. Et d’après le kongossa qui m’a été rapporté, plus de 50 % des conversations tournaient autour de l’immobilier.

Donc, pendant que les autres sont en train de construire un futur qui défie nos imaginations les plus folles, notre part d’élite, puisque c’est comme ça qu’ils se qualifient, est en train de voir comment venir encore nous augmenter les meublés ici.

Ou bien, on a fait quoi à la Terre pour mériter ça, oh, je ne sais pas !


Douala 🇨🇲 

Prendre des risques : la clé pour accomplir de grandes choses

Aujourd’hui, j’aimerais te partager un passage d’Orison Swett Marden dans Une Volonté de Fer (An Iron Will) :

"Ceux qui ont accompli de grandes choses dans le monde ont été, en règle générale, audacieux, combatifs et sûrs d'eux-mêmes. Ils ont osé se démarquer de la foule et agir de manière originale. Ils n'avaient pas peur d'être des généraux. Il y a peu de place dans cette époque encombrée et compétitive pour le jeune timide et hésitant. Celui qui veut réussir aujourd'hui doit non seulement être courageux, mais aussi oser prendre des risques. Celui qui attend la certitude ne gagne jamais."

Déjà en 1901, date à laquelle le livre a été publié, l’auteur reconnaissait qu’il n’y avait presque plus de place pour le jeune timide et hésitant, et qu’il fallait non seulement être courageux mais aussi oser prendre des risques. Aujourd’hui, il y en a encore moins.

Ces derniers mois, j’ai discuté avec beaucoup trop de personnes qui ont peur de se lancer, qui hésitent, qui ont peur d’échouer, qui ne savent pas s’ils devraient prendre le risque. Si toi aussi, tu fais partie de ces personnes qui se posent toutes ces questions, sache que tu ne pourras rien accomplir de grand si tu ne sautes pas le pas. C’est maintenant ou jamais.


Douala 🇨🇲 

Courage ou opportunisme ? Quand l’Afrique devient un concept de marketing

Ce matin, je suis tombé sur un post LinkedIn. Ou qui m’a même renvoyé sur les réseaux sociaux ces derniers temps, oh ? Bref… Apparemment, il y a quelques jours était organisé à Paris un autre de ces événements où les “anciens” Africains vivant en Occident et coupables d’avoir fui leur mission en Afrique se retrouvent pour se convaincre les uns les autres que l’avenir est sur le continent. La majorité avec leurs passeports occidentaux en poche, se donnant rendez-vous l’année suivante non pas sur le terrain en Afrique, mais au même endroit… à Paris.

Donc, depuis quelques jours sur LinkedIn, on n’a que pour ça. Chacun y va de sa petite histoire. Entre ceux qui ont payé leurs billets à 500 € (le minimum apparemment) en se plaignant que l’accès à certaines masterclass était encore payant à l’intérieur, et ceux qui ont payé leurs stands à 2000 € pour montrer leurs business à l’audience africaine, il y en a pour tous les goûts sur LinkedIn actuellement.

Mais ce matin, je suis tombé sur un post qui m’a particulièrement énervé. Au point où j’ai laissé un commentaire. Sacrilège ! Ronel, où est passé le stoïcisme en toi ? Ah, la chair est faible.

Revenons à ce post. Il s’agissait d’un jeune Camerounais qui nous expliquait qu’il avait quitté le Cameroun en 2022 pour la France. Qu’il a dû se bagarrer comme un beau diable pour pouvoir joindre les deux bouts. Et encore plus pour trouver un boulot après son master. Il a oublié la partie où il a refusé de rentrer au Cameroun après ses études, comme il l’avait certainement annoncé à l’ambassade en demandant son visa. Et là, il invitait les lecteurs à le rejoindre à cet événement pour discuter de l’entreprise qu’il a lancée, pour révolutionner le secteur pharmaceutique depuis, roulement de tambours, la France.

Le post culminait à plus de 1000 likes. Et les commentaires fusaient de toute part pour le féliciter pour sa détermination et son abnégation. Et moi, de me demander si je suis le seul à me rendre compte qu’il y a quelque chose de malsain dans tout ça. S’il était aussi résilient et courageux que cela, pourquoi avoir décidé de fuir vers la France ? Pourquoi avoir décidé d’y rester après ses études pour lancer son projet en direction de l’Afrique ? Pourquoi ne pas avoir fait preuve d’autant de courage dans son pays ? Surtout que j’ai l’impression qu’il est parti en France en ayant déjà un diplôme supérieur et une certaine expérience acquis au Cameroun.

Bref, notre niveau de bêtise ne cessera jamais de m’étonner ! Et merde, pourquoi aller à un évènement qui prône le retour en Afrique 2 ans après être arrivé en France? Tu ne pouvais pas tout simplement rester en Afrique?


Douala (not Paris) 🇨🇲

Le paradoxe africain : plus de moyens, moins de réalisations ?

Depuis quelques jours, je lis un livre assez intéressant sur le nombre d’or. Et cela m’amène à faire des recherches sur tout un tas de personnages qui ont marqué la culture occidentale. De Pythagore (580 avant J.-C.) à Léonard de Vinci (1452), en passant par Platon (428 avant J.-C.) ou Vitruve (80 avant J.-C.). Bref, tout un tas de personnes qui ont marqué le monde par la pertinence de leurs travaux.

Je ne peux cependant pas m’empêcher de penser qu’une ville comme Douala aujourd’hui est nettement plus développée que les villes dans lesquelles la plupart de ces scientifiques ont pu vivre à leurs époques. Et je ne parle même pas des conditions d’hygiène actuelles qui n’ont rien à voir avec celles de ces époques.

Comment se fait-il que malgré cela, nous n’arrivions pas en Afrique à faire mieux qu’eux ? Pourquoi pensons-nous que nous devons forcément partir au Canada ou en Europe pour faire quoi que ce soit, quand Pythagore, Platon ou Vitruve ont pu réaliser autant de choses en vivant dans des pays beaucoup moins développés que les nôtres actuellement ? Ou bien est-ce là notre aveu de faiblesse aux yeux du monde ?

Nous ne sommes peut-être pas encore au même niveau de développement que certains pays, mais que faisons-nous par rapport à notre niveau actuel ?


Douala 🇨🇲 

Pourquoi tout le monde veut partir : une simple vérité

En mai de cette année, j’ai eu une discussion avec un pote vivant en Occident et de passage au Cameroun. Il cherchait à connaître mon avis sur la situation du pays, sur nos problèmes, sur ces petites choses qui nous empêchent d’avancer. Nous avons fini par aborder le fameux sujet, non pas celui du Canada, mais presque : le sujet de tout le monde qui veut partir. Et il m’a posé la question à laquelle je travaille depuis quelques années déjà et dont j’ai tant cherché la réponse.

Il m’a dit en ces termes : “Ronel, toi que je connais, concentré sur le sujet du Cameroun depuis si longtemps. À ton avis, pourquoi tout le monde veut partir ?”

J’ai d’abord souri, car cela m’a renvoyé à mon mot préféré : la sérendipité. Si tu ne sais pas ce que cela signifie, j’ai demandé pour toi à Claude de le définir brièvement et voici ce qu’il a dit : “La sérendipité est la faculté ou le phénomène de faire par hasard une découverte inattendue et heureuse, généralement alors qu’on cherchait autre chose. C’est une forme de chance ou de coïncidence productive qui mène à des trouvailles importantes ou utiles de manière fortuite.”

J’ai souri en pensant à la sérendipité lorsqu’il m’a posé cette question, car il y avait à peine quelques jours que j’avais enfin trouvé moi-même la réponse. Et comme je l’ai dit plus haut, j’avais passé des années à la chercher.

Avant de te donner la réponse que j’ai trouvée, il faut que tu saches que j’ai étudié sous tous les angles toutes les réponses que tu pourrais imaginer actuellement si tu t’es déjà posé cette question, et qu’aucune ne tenait la route mathématiquement parlant. Car, oui, il ne s’agit pas d’une question littéraire, mais bel et bien d’un problème mathématique : quelle est la cause principale d’un phénomène précis observable ? Comment distinguer le signal du bruit ?

Peut-être qu’un jour, je prendrai le temps de faire un long essai sur la méthode que j’ai utilisée et comment je suis arrivé à ma conclusion. Mais pour l’instant, je vais juste te donner la réponse comme je l’ai faite il y a quelques mois à mon pote. Et elle tient en un seul mot : L’ENVIE !

Tu es peut-être surpris, et tu te dis certainement : “Non, les gens partent parce qu’ils ont faim, parce qu’ils veulent un meilleur avenir, parce que le pays est risqué…” Oui, c’est vrai, c’est ce qu’ils disent. Mais comme je te l’ai dit, j’ai examiné toutes ces raisons sous tous les angles, et aucune ne fait l’unanimité. Tu pourrais dire qu’il ne peut pas y avoir une seule raison, que chacun a son histoire et ses particularités. Oui, nous sommes tous différents. Mais les lois de la nature s’appliquent de la même façon à tous. Le reste n’est qu’un narratif, une histoire que l’on se raconte.

L’envie, tout comme l’ego, est un virus très puissant. Il ne se manifeste jamais de la même façon chez les individus qu’il affecte. Chez une personne, l’ego va le pousser à acheter la plus grosse voiture du quartier, chez une autre, il va le pousser à vouloir avoir le plus de partenaires sexuels possible. Les manifestations sont diverses, mais c’est la même cause qui est à l’œuvre.

Encore plus sournoise que l’ego, l’envie est un virus très dangereux. Semblable aux virus sexuellement transmissibles, dont l’un des tours de magie est de pousser la victime à avoir honte de son affection et à n’en parler que quand il est trop tard. C’est une catégorie de virus passé maître dans l’art du syndrome de Stockholm. Comme disait Plutarque il y a presque 2000 ans déjà : “L’envie est le seul vice dont on n’avoue pas la faiblesse.” Un peu comme un virus dont on n’avoue presque jamais la contamination.

Pourquoi tout le monde veut partir ? Parce que nous sommes extrêmement envieux ! Aussi simple que cela. Tout le reste n’est que des histoires que nous nous racontons pour essayer de rationaliser nos comportements.

Mais même l’envie n’est pas incurable. Et comme pour la plupart des problèmes, le plus difficile est de trouver la cause. Une fois cela fait, développer des solutions appropriées n’est plus qu’une question de temps. Et tu dois imaginer que j’y travaille déjà. Peut-être que dans le futur cela fera l’objet de mon discours un 10 décembre à Stockholm ou à Oslo.

Pourquoi je t’en parle aujourd’hui ? Un bon ami à moi m’a fait une confidence ce matin. Il a été contacté pour trouver un billet d’avion pour un vol vers N’Djamena, au Tchad. Apparemment, une de ses clientes doit s’y rendre pour passer le test de langue pour le Canada, le Cameroun n’ayant plus de dates disponibles avant très longtemps. Combien coûte le billet d’avion ? Plus de 600 000 FCFA (1000 €). Mais le plus intéressant, c’est cette cliente. Une jeune dame dans la trentaine, cadre dans une grande multinationale de la place, qui roule dans une voiture (pas une voiture de service, la sienne) de 14 000 000 FCFA (21 000 €) et qui vient de s’acheter un terrain de 20 000 000 FCFA (30 000 €) pour y construire sa maison. Tout cela en ayant fait tout son cursus scolaire au Cameroun et venant d’une famille modeste. Elle aussi se dit que peut-être c’est au Canada qu’il y a la vérité !

Comme disait Napoléon Bonaparte : "L’envie est une déclaration d’infériorité."


Douala 🇨🇲